Insouciance

Publié le par la freniere

Mes contemporains traversent l’espace 
des jours, dans l’impatience de brûler 
et de disparaître, sans aucune attention 
pour l’horizon, dont les éclats fleurissent 
la mémoire d’un fleuve fiévreusement oublié. 
La route avale le silence de chacun ; 
les ponts reçoivent l’inventaire des solitudes 
éparpillées dans le métal. Plus personne 
ne pense ; tout le monde suit le mouvement 
sans réfléchir, chacun dans sa solitude 
avec l’argument bien martelé des obligations 
ou avec celui du droit individuel au confort 
– alors que la petite planète implose 
sous la pression de nos insouciances. 
Dans un autobus presque vide, je poursuis 
mes lectures avec calme, je regarde le fleuve 
au moment de franchir le pont et je vois 
tout autour les automobilistes solitaires 
qui défilent, avec un air hébété d’impatience.

 

Claude Paradis

 

Publié dans Poésie du monde

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