Comment dire
Comment dire sans trembler le passage du vent,
la moelle prisonnière d’un ossuaire de tôle,
la sève que refuse le bois,
le mot qui manque au bout de chaque phrase,
l’endroit du livre où il manque l’auteur,
les pieds nus prisonniers des souliers,
les pas de danse oubliés par la route,
la soif d’une bouteille qu’on ne remplit jamais,
le lieu toujours présent où l’on ne sera jamais,
le temps dévalué par les horaires de travail,
le visage brandi comme un masque à la main,
la pensée sans image, la foi sans parabole,
le désert sans mirage, le désir sans miracle,
la neige qu’on invente pour oublier le froid,
la souffrance d’être seul quand on ne rêve pas,
la grand amour qui passe quand nous sommes absents.
Ce que je n’écris pas ce sont mes propres mots
que j’éloigne de moi, ma chair que j’efface.
On ne peut sans amour compléter ce qui manque.