Décès d'Alain Jouffroy
Poème contre la gloire
De nos nuits — il y en a
De nos jours — et même de nos siècles — il y en a
Mais
soudain la
GUERRE met les pieds sur la table et dessous
le trafic d'influences commence à bouche-que-veux-tu
le comique troupier et la glorieuse mégère sont de la partie
on se presse aux
Noctambules
on est vraiment submergé de
FLASHES
le stylo-bille
Grand
Cordon de la
Jarretière
les époumonantes intervieweuses leur bave oblique et maigre
les titres mastoc en coups de trique sur la nuque
le petit topo pas piqué des hannetons
le coffre-fort des dictionnaires
la notice au vestiaire et le vison de la haine des copains
le slalom géant de la responsabilité universelle
le
Nobel
Fox
Moviétone
les tuiles quémandeuses les admiratrices en robes transparentes
et qui toussent et qui toussent
(il y a tellement de fumées sans geyser de ce côté-là)
la gloire aux torchons la gloire aux brosses
la gloire aux crachoirs
la
GLAIRE
je la jette
Passer par l'absence de portes
heureusement par miracle par souci de tranquillité par
appétit du malheur par esprit de camaraderie par lâcheté
par folie du sacrifice par résignation par un coup de tête
heureusement par mille coups de tête heureusement par
trois millions de coups de tête hélas cent mille fois hélas
par bêtise par passion heureusement cent mille fois par
amour par sensualité hélas mille fois hélas quatre cent
mille fois par hasard
je suis passé
je ne suis pas passé
je refuse de passer
je m'oblige à passer
je crois que je vais passer
je redoute de ne pas passer
hélas
par les portes de derrière les portes
par l'absence de
Septième porte
par le
Trou où nul n'est apparu
hélas hélas hélas
mille fois hélas mon gardien de musée
cher gardien des 365 portes de
Toussaint
Louverture
très cher gardien des 120 journées de
Saumane
hélas hélas
je ne suis pas passé
mais par les portes de la cascade par les portes emportées
dans la débandade par les portes enfoncées les unes après
les autres par les caves du vieux navire fracassé par mon
corps par ma tête par ma catatacte par l'absence même de
portes
je suis passé
je passe
je ne cesserai jamais de passer
Alain Jouffroy