Ernest Pignon-Ernest

Publié le par la freniere

Ernest Pignon-Ernest
Jean Genet

Brest – 2006
Comment s’affranchir de l’art du portrait quand on veut évoquer un artiste, un écrivain, un poète ? Quelle image, quelle mise en situation va immédiatement suggérer son destin et son oeuvre ? Avec Jean Genet, Ernest Pignon-Ernest a privilégié une scène sans citation directe des romans ou des pièces de théâtre de l’auteur du Balcon, mais qui restitue une tension, entre agression et désir, une symbolique, entre crucifixion et aimantation des corps. Dans son dessin, sacré et profane se mêlent. Les trois personnages appartiennent à une marge interlope où règnent l’élégance et l’étreinte, la violence et l’instinct.

En collant cette composition sur plusieurs murs des docks de Brest, Ernest Pignon-Ernest faisait certes furtivement allusion à une certaine Querelle, sans s’appesantir cependant sur la référence. C’est plus le choc des esthétiques, l’irruption dans un univers de poutrelles métalliques, de grues, de containers, d’une représentation classiquement maîtrisée, qui étaient recherchés. Car, il y avait là, pour le plasticien, une façon efficace et juste d’entrer en résonance avec le projet provoquant de Genet. En usant d’un style impeccable, digne des auteurs de grande tradition, celui-ci avait voulu dévoyer, non le langage, mais les messages, non la forme, mais le fond, non les rythmes, mais les mentalités. Et pareillement, avec ses armes graphiques, Ernest Pignon-Ernest n’avait eu de cesse de jeter le trouble dans les rues, de rompre l’ordre du visible et de rendre manifeste la révolte, la beauté, l’interdit.

André Velter (in Bartschi-Salomon Editions)

Publié dans Les marcheurs de rêve

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