La force des racines
Je ne veux plus de claquements de portes,
de claquements d’armes,
de claquements de dents,
de craquements d’os.
Je veux des claquements de doigts
sur un air de fado,
des claquements de langue,
des claquements de mains,
des lapements de chat derrière l’oreille,
des jappements de loups
aux abords de la ville.
J’habite une maison
qui voyage avec moi,
une maison de routes
qui mènent vers la mer,
une maison de mots
célébrant la lumière.
Le verbe manque souvent
dans les lettres d’amour.
On qualifie sans faire.
On fait des mailles sur le vide.
Ceux qui partent laissent
toujours quelque chose.
Je sens monter en moi
certains gestes de ma mère,
ses mots dans mes paroles,
son âme agrandissant la mienne.
Je fais confiance à la force des racines,
à l’eau rendue visible par la soif,
à ma sœur végétale,
à mon frère minéral,
à mon pote animal,
à l’espérance assise
entre les pommiers ronds,
aux muscles de la pierre,
aux longs doigts de la mer.
Il a fallu le ciel pour ouvrir nos yeux.
Il a fallu la mer pour étonner l’ancêtre.
Il a fallu le feu pour épouser la verticale.
Le soleil du plaisir a patiné l’argile.
Il a fallu l’amour pour inventer le pain.