Ils ont dit

Publié le par la freniere

Je n’ai pas de définition de la poésie, mais voici deux propos, issus de mon Journal:
Le vrai, parfois, se met en colère, sanglote dans sa solitude, entre en contemplation ou se tape un fou-rire. Je crois, même si c’est très simple, qu’on appelle poésie ces secousses impromptues, inopinées, souvent subversives et sans pouvoir, néanmoins.
Pourquoi on ne comprend pas tout, quand on lit un poème?, m’a récemment demandé Inès.
Je l’ai remerciée pour sa question. On ne comprend pas tout dans un poème, parce que dans la vie, aussi, on ne comprend pas tout.
On ne comprend pas tout, parce qu’un poème épouse un rythme, celui de la respiration, celui des battements du cœur, celui de la scansion du sang, mais il le fait avec des mots, ce qui le distingue de la musique (où l’on ne comprend rien), peut-être seulement parce qu’avec tous les mots on ne peut pas tout dire.
On ne comprend pas tout, parce que le poème se révolte contre les modes d’emplois, les moralismes, les explications,
parce qu’il reste du sens à venir.
C’est l’espérance du poème.
On ne comprend pas tout, parce que le poème subvertit même l’idée que comprendre serait accomplir.
Bien sûr, et Inès aurait alors bien raison de s’énerver, quand on ne comprend rien, ce n’est pas non plus un poème.
Mais prendre avec soi le mystère d’un poème, cela s’apparente à une promenade sans balise.
Et pourquoi, chère Inès, notre tâtonnement de vivre serait-il plus important que le poème qui le révèle?


Lucien Noullez

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