Un cahier
J’ouvre un cahier. J’ouvre quoi ? Une fenêtre sur le bois sombre de la table. Pas de ciel ni de grange déglinguée, pas de rue en face. J’ouvre quoi ? Un seuil ? Un passage ? Juste un espace où chuter du regard. Du silence en corps d’oiseau. Du gris mauve étalé au-dessus des toitures. Du rien mais pur, sans remords. J’ouvre un carré long de neige, invente une pierre de lait sur le ventre strié du châtaignier. Une question muette se pose à mes contours. Je me laisse emporter par son acuité sans y répondre cherchant à ricocher dans mon souffle. Je tombe de tous mes fruits dans ce voyage où rien ne bouge en dehors de la phrase, à la vitesse d’une lumière cachée sous les choses, dans leur centre profond.