Dans l'oreille
J'ai toujours su qu'il battait ailleurs. Mon cœur bat dans l'oreille. Dans les gris pour un bleu. Les fourneaux de l'été. Les doigts du violoneux qui tirent sur la corde. Les pluies de mon poignet. Le miel pour l'ours. Le cœur bien à sa place c'était le pain des autres. L'orange à la bonne saison. Moi, jai toujours eu faim. De l'orage qui met le ciel par terre. Du solide de l'arbre engrangé dans ses veines. Du Chasselas, gonflé de transparence. Du Gros-vert, dont on a oublié jusqu'au nom. J'ai faim d'un bois de barque simple. Une plume me suffit pour refaire l'oiseau. J'écris enguenillée, le présent sur mon dos. Comme on prie, comme on crie. Et quand les mots me lâchent je me tiens au silence. J'écris comme septembre laisse tomber ses jupes sans un soleil de plus. Comme novembre pourrit ses chrysanthèmes. Chaque geste en moins augmente le vécu. Je veux le plus du moins, le plus loin que l'amour. La récolte n'est jamais trop abonde. Les murs sans ouvertures peuvent garder leurs suints, je suis des évasions comme de ces rias entre les bras des terres. Des mots à mélanger à une autre salive, comme des mots qui taisent. La terre haute est la plus nue. Les fleurs sauvages sont petites. J'entends chaque caillou, il bat dans mon plus juste. Et l'aiguille du gel comme celles des horloges n'y pourront rien changer. Mon cœur bat dans l'oreille.