Jean-Pierre Georges

Publié le par la freniere

Jean-Pierre Georges est né à Chinon en 1949. Instituteur à Romorantin, il vit à Chabris. Il écrit pour «se farcir la vie en tête à tête». L’originalité de Jean-Pierre Georges, qu’on peut mesurer au ton de sa voix, réside dans un pessimisme qu’un sourire timide relève souvent. Quelle que soit la déréliction dont il nous entretient, l’apitoiement sur soi n’est pas de mise : on pense sans cesse au-delà, car sa voix dit bien l’humaine détresse que traversent des bonheurs de toute sorte ; « l’amour c’est fait pour ça / il y a plein de gens très tranquilles / au fond des tombes ».

Poète du quotidien, Jean-Pierre Georges délaisse de plus en plus le vers pour une prose faussement dilettante, joliment désabusée. Un air de Perros sur un rythme de Chardonne. Ou le contraire. En soixante-dix textes brefs, qui n'excèdent jamais une page, l'écrivain laisse entendre le tic-tac du temps qui tisse l'ennui d'être vivant. C'est que le bonhomme est comme cette pie qu'il "pousse du pied (…), qui s'envole quand même, à la fin. Sans conviction. Parce qu'il faut." Restent les paysages, reste une "jeune fille floue qui répand autour d'elle de l'émoi", reste la pêche et les souvenirs de l'enfance. "Quelle vérité taire avec les mots"? se demande l'écrivain. Avançons que sous l'apparente incapacité à vivre se cache une insatiable soif d'adolescent. Et parions qu'il y a de la pudeur chez Jean-Pierre Georges à laisser toujours dans ses recueils des textes moins nécessaires, moins réussis. Le nihiliste serait bien embêté s'il écrivait des chefs-d'oeuvre, c'est-à-dire des choses qui valent le coup de vivre.
 
Bibliographie :

· Aucun rôle dans l'espèce, Editinter, 2004
· Le Moi chronique, Les Carnets du Dessert de lune, 2003
· Aucun rôle dans l'espèce, Tarabuste, 2003
· Passez nuages, Multiples, 1999
· Trois peupliers d'Italie,Tarabuste, 1997
· Je m'ennuie sur terre, Le Dé Bleu,1996 et 2001
· Bonheur à suivre, Tarabuste, 1994
· Car né, La Bartavelle, 1994
· La plainte, Tarabuste, 1988
· Oiseaux, La Bartavelle, 1988
· Dizains, disette, Le Dé Bleu, 1987
· Où être bien, Le Dé Bleu, 1984
· Rien simple menace, Le Dé Bleu, 1980
 
 
*
 

Ah, merde, merde, merde. Que ces heures me
pèsent. Il faut que je sorte de moi, que je
gicle d'ici. Et me voici dans les rues avec un chien qui
me suit comme si j'étais son père, impossible de m'en
débarrasser, et maintenant il est devant avec son collier
pourri et ses oreilles sales et se retourne sans arrêt pour
voir si j'arrive, il n'en finit pas de lever la patte sur tout ce qui affiche verticalité. De quoi sommes-nous faits, je suis au bord des sanglots, la moindre petite maison palpitant dans ses branches me semble un fruit de la
création, - un maçon me fait plus d'effet qu'un poète -.
Et voici que je joue comme un gosse dans une venelle
avec les blocs de glace épargnés par le dégel. Plus loin,
entre un oratoire et une vieille vigne d'appellation
Valençay V.D.Q.S., ma vie me saute à la gorge, son désir
de vengeance est terrible. Elle me demande ce que j'ai
foutu, depuis tant d'années, et pourquoi, pourquoi j'en
suis arrivé là.

Extrait de Aucun rôle dans l'espèce, Tarabuste, 2003

 
Jean-Pierre Georges

Publié dans Les marcheurs de rêve

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