Alexis Lefrançois
(1943-) Écrivain et traducteur littéraire, Alexis Lefrançois est, depuis 1985, éleveur de chèvres angoras de race pure. De 1971 à 1973, il enseigne en techniques audio-visuelles à l’Université de Dakar, au Sénégal, où, de 1981-1986, il assiste la direction du Centre d’études des sciences et techniques de l’information et de la communication. Il assume plusieurs charges de cours, notamment en traduction littéraire à l’Université Laval en 2003.
Journaliste-pigiste auprès de plusieurs journaux et périodiques, il est, de 1994 à 1996, rédacteur en chef de la revue Astronomie-Québec. Directeur littéraire, il dirige la collection « Garamond » aux Éditions du Roseau et, depuis 1993, la collection « Miroirs » (écrivains canadiens et anglo-québécois en traduction) aux Éditions de la Pleine Lune. En 1968, en 1975 et en 1999, il obtient la bourse de création littéraire du Conseil des Arts du Canada. Il a effectué plusieurs séjours en Grèce, à Elaphonissos.
Depuis 1976, il a traduit de nombreux livres de l’anglais au français pour diverses maisons québécoises et françaises, sous le pseudonyme Ivan Steenhout. Sa carrière de traducteur est couronnée de nombreuses récompenses. Il obtient deux fois le Prix de traduction du Conseil des Arts du Canada : en 1980 pour John A. Macdonald et en 1981 pour Construire sa maison en bois rustique. En 1986, il reçoit une mention spéciale du jury du Prix du Gouverneur général pour Robe noire. Il est finaliste du Prix du Gouverneur général, dans la catégorie traduction francophone, pour Train d’enfer en 1998, Onyx John en 1997 et La Couleur du sang en 1987. En 1987, il obtient le Prix du Gouverneur général, catégorie traduction francophone, pour L’Homme qui se croyait aimé, prix qu’il obtient à nouveau en 2004, pour Les Indes accidentelles. Alexis Lefrançois est membre de l'Union des écrivaines et des écrivains québécois.
Calcaires, Éditions du Noroît, 1971
36 petites choses pour la 51, Éditions du Noroît, 1972
Mais en d’autres frontières, déjà, Éditions du Noroît, 1976
Rémanences, Éditions du Noroît, 1977
La belle été suivi de La tête, Éditions du Noroît, 1977
Comme tournant la page, rétrospective en deux volumes, Éditions du Noroît, 1984
L’abécédaire des robots, Les heures bleues, 1999
Pages tombées d’un livre, Le lézard amoureux, 2006
L’œuf à la noix, rétrospective, Éditions Nota bene, 2006
il me reste ces mots ces jeux et ces nuances
ce chant d’un autre temps ce rituel sur soi
cette musique superbement futile
ce dérisoire et froid tracé
il me reste l’orgueil aujourd’hui de parler
la fierté de cette longue absence et lentement
passer laisser sur ces mots éblouis de silence
et ce pas fasciné par de plus hauts soleils
la distance s’accroître
la lumière imposer la mesure et le nombre
et ce calme à celui de la stèle pareil
il me reste à chanter le mutisme des sables
l’ab-humaine splendeur où se déploie le jour
célébrer cet éclat des cristaux et des gemmes
dans cette nuit rocheuse où s’achève leur cours
il me reste à chanter d’impeccables silences
de plus lointaines fêtes et de plus blancs déserts
et plus loin que le ciel et toute indifférence
plus loin que le mépris qu’on imagine aux pierres
plus loin que tout retrait tout accord tout malaise
il me reste à chanter lumineuse la mort
*
si tu savais quand tu viens
comme ils comblent les gouffres
comme s’aplanissent les montagnes
comme ils replacent les choses
à leur exacte place
chacun comme il revient
dormir derrière son nom
couché derrière les vitres
comme si de rien n’était
comme si c’était l’automne
et l’ombre sur un parc
et dehors
la reptation d’un arbre
vers sa lumière
ne s’exprime ni dans ses mots
ni dans ses gestes
et ni dans le silence
ils ont cadenassé les arbres
sur des civières
ils ont assis les arbres
sur des chaises droites
je me souviens des oiseaux
je me souviens des enfants des oiseaux
je me souviens de ce côté des vitres
du regard bleu
est-ce qu’un poisson ça pleure
au fond de sa rivière
est-ce qu’un moineau ça pleure
est-ce qu’un minou ça pleure
est-ce qu’un caillou ça pleure
dans le noir de sa terre
ou bedon juste nous
puis les saules pleureurs
avec les cafards sales
parce que parfois c’est triste
et les coureurs cyclistes
qui pédalent et pédalent
et se tirent le nez
sans salir de mouchoir
sans jamais s’arrêter
ils nous couperont les mains
nous n’écrirons pas
ils nous couperont les pieds
nous ne marcherons pas
ils nous couperont les bras
nous n’étreindrons pas
ils nous casseront les dents
nous ne mâcherons pas