Henri Heurtebise
J'aime dire la poésie : aussi me suis-je lancé dans le récital poétique à partir de 1974. Auparavant, en 1970, j'avais fondé Multiples avec René Cazajous, mort en 1972. J'assume donc tout seul la responsabilité de cette revue de poésie depuis cette date.
En 1987, je lance un cycle de lectures poétiques dans la plus active librairie de Toulouse : Ombres Blanches. J'ai fêté la 100ème en juin 2001 : nous étions six à lire Artaud...
Pour ce qui est de ma poésie, j'ai trois écritures : celle qui pense (dans "discrétions poétiques"), celle qui rit (Adam et Eve, Monsieur de non Juan), celle qui chante.
Dans mes poèmes, que depuis 1991 j'appelle odes, j'ai toujours chanté. J'entends par là, depuis quelques années, que la musique et le rythme doivent être premiers. Sans négliger le sens (comment le négliger complètement sans tomber dans la déraison extrémiste de l'avant-garde), tout se passe à l'arrière-plan. (...)
Ecrire pour moi, que je réfléchisse, que je rie ou que je chante, est porter à la meilleure forme (irrécusable et intraduisible) la plus forte humanité dans un monde que je voudrais qualitatif.
Bibliographie
Contes
Monsieur de non Juan éd. N et B, 2000
Adam et Eve éd. Multiples, 1997
Anthologies
L'Aquitaine revue Vagabondages, 1986
Les Poètes du Sud-Ouest Multiples, 1985
Poésie
plus de 14 publications dont :
Chantecri (Chambelland, Bagnols, 1970)
Aires de parlerie (Verticales 12, Decazeville, 1980)
Le menu temps (Encres vives, no 123, Toulouse, 1985)
D'automnes (Rougerie, Mortemart, 1990)
L'inépuisable fini (Multiples, Longages, 1990)
Le chevet (Rougerie, Mortemart, 1994)
D'Imaginie (Rougerie, 1996)
Adam et Eve (Multiples, 1997)
Humaine humain (Rougerie, 2000)
Filigranes (Encres Vives, 2004)
Chant profond (Rougerie, 2005)
ET NOUS VIVONS
DANS LE CASSE
La main grise du temps
passe sur les cours pauvres
Les machines abandonnées
cliquetis !
Ville sans architecte
portes sèches
perdues
Pendule de fond de glace
La main grise du temps
longe les vies
Elles se penchent
glissant sur les vitrines propres
et je suis là
composant d'ailes
composant
Le chant déborde
Les petites miséricordes
viennent grossir les bars
les places d'ombre
Nombre décoloré
C'est le divers de miettes
et nous vivons dans le cassé
Froid de pâle violette
dans l'immobile on reste
en attendant l'été
la verdure unifiante
l'ombre de propreté
Silence à la nécessité de perdre.
*
L'HEURE CONTINUE L'HEURE
Être dans la lumière
tu vois
d'un matin frais
Vivre ce calme
pour le calme
Vivre c'est bien
tu vois
sans rien de gêne
ni de moteur
Être dans l'écriture
tu vois
d'un matin sans violence
dans l'attente récompensée d'attendre
Le matin
entends-tu matin
attend l'heure
qui vient d'avant
Souriant au sourire
qui t'environne
lance ta marche
Qu'on n'entende
que la lumière
horizontale et fine
L'heure continue l'heure
et pour cela souris.
*
DEPUIS MA NAISSANCE
Légèreté souriante d'automne
là
dans ce soleil de prix
l'espérance d'être de longues courbes
m'emporte
bras s'étirant des bras
jusqu'aux douces températures
Ah ! depuis ma naissance
ma première étendue
je cherche
Dire les fils
où septembre s'unit à l'air
dans la phrase sensible
la mise en avant des mots
dont j'allège les sommes
Ainsi importe parler
résonne l'être
autour
peut-être dans
l'espace à prendre
jusqu'à toi.
*
on meurt souvent
on crie
mais chaque jour on entre
en matière lumière
et si votre amie est exquise
délicate comme l'ombre
alors peut-être entrez-vous
en terres imaginaires
jadis moquées
et respirez-vous le large et l'intime
ce que je nomme le chevet.
Henri Heurtebise