Décès de l'artiste multidisciplinaire Pierre Dumont

Publié le par la freniere

  photo-PierreDumontSous le toit d’une petite cabane en bois se cache l’atelier d’un artiste multidisciplinaire bien établi. Plein à craquer, l’atelier déborde d’œuvres d’arts, d’outils et de nombreux souvenirs. Entre deux sculptures, Pierre Dumont se lance dans la peinture, la musique et même dans l’écriture. Portrait d’un pionnier de la culture au Saguenay—Lac-Saint-Jean.

 

Dès l’âge de 12 ans. Pierre Dumont grattait sa guitare en chantonnant des paroles d’amour. Depuis ce jour, il n’a plus jamais quitté le monde culturel. Sa passion pour les arts l’a mené sur les bancs d’école universitaires, où il a complété un Bac en sculpture en 1975.

 

M. Dumont explore, encore aujourd’hui, plusieurs types d’arts. Selon lui, toutes les facettes de ses œuvres s’unissent en plusieurs points. «La perception, la lumière, l’espace, les tons… Les termes sont très semblables dans les disciplines, mais les médiums sont différents», explique l’artiste. Cependant, il n’utilise pas de technique particulière pour que tout se joigne aussi harmonieusement, lors d’une exposition.

Chaque journée est un nouveau défi pour lui. Il se réjouit de sa polyvalence artistique : «Je suis un grand impatient! Je me tanne rapidement, alors une journée je peux peindre une toile et le lendemain je peux la laisser de côté pour commencer un nouveau projet.»

 

L’homme n’a pas de processus de création bien précis; il préfère improviser et laisser libre recours à son imagination. Tous les vieux objets qu’il trouve sont source d’inspiration profonde pour lui. Il prend plaisir à utiliser de vieux rebus de bois ou de métal qui deviennent les pièces maîtresses de bon nombre de ses œuvres.  «Pierre est un passionné! Il assume ses œuvres et il ne suit pas les modes, en récupérant tous ces objets», témoigne un collègue de longue date, lui-même peintre et écrivain, Gérald Savard.

 

Pierre Dumont va même jusqu’à produire ses propres instruments de musique, toujours à base d’objets récupérés. «Pour moi, faire seulement une forme d’art, ce n’est pas suffisant. C’est comme quelqu’un qui ne se contente pas d’apprendre seulement une langue», confie-t-il.

 

 

Implication hors du commun

 

Tout au long de ses études post-secondaire, le jeune homme s’impliquait dans de multiples organismes sociaux et culturels. Avec le temps, il a poursuivi cette initiative, en cofondant une des premières galeries  d’arts à Saguenay. La galerie de l’Arche a vu le jour à la fin des années 70. Une quarantaine d’artistes se produisaient sur la scène alors que d’autres exposaient sur les deux étages de la galerie. Il y avait aussi un café, un cinéclub et des soirées de poésie : «On faisait un peu le travail du centre culturel, mais sans salaire», témoigne-t-il, le sourire en coin.

 

Il a aussi collaboré à la création du Centre d’expérimentation musicale (CEM), avec lequel il a démarré le Festival des Musiques de Création du Saguenay, en 1989. Depuis deux ou trois ans, Pierre Dumont transmet tranquillement ses connaissances à la relève. «Avec Pierre, ça ne tourne jamais en rond! Il veut toujours qu’on innove et qu’on amène de la nouveauté», lance Sébastien Maltais, aspirant à la direction du festival dans un futur rapproché. «C’est un artiste libre, sensible et généreux, avec qui je collabore depuis je ne sais plus combien d’années pour le Festival des Musiques de Création», souligne le directeur général et artistique du Café-Théâtre Côté-Cour, à Jonquière, Réjean Bouchard.

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Laisser sa trace

 

«Il faut s’avancer, s’éduquer dans la vie. Pour ça, il ne faut pas seulement se contenter de la culture populaire. Il faut aller plus loin et inciter à aller plus loin. Ça, c’est un point de vue de travailleur culturel», explique le principal intéressé. Il s’est donné comme mission de faire découvrir la culture à la jeunesse en s’impliquant à la Maison d’animation sociale et culturelle de Jonquière. «Il agit vraiment comme une courroie de transmission avec les jeunes», confirme Gérald Savard.

 

M. Dumont a aussi fait connaître ses opinions en participant à la mise en place du Conseil des arts de Saguenay. Dans le passé, il avait aussi contribué à l’élaboration de la politique de développement culturel de la Ville de Jonquière. «Il faut s’impliquer, parce que malheureusement, on a besoin d’argent pour financer nos projets et cet argent, elle vient du monde politique», admet le créateur. Il déplore le fait que les artistes soient si valorisés par les politiciens, mais si peu subventionnés par ces mêmes individus.

Ancien enseignant en arts visuels au Cégep de Jonquière, Pierre Dumont croit que depuis que l’art est intégré au système d’éducation, la culture fait partie de la vie de tous. «L’art, c’est comme une épice. Pendant des années, tu ne sais pas dans quelle recette l’utiliser. Quand on trouve la bonne recette, on ne peut plus s’en passer», raconte Pierre Dumont.

 

En janvier dernier, l’artiste multidisciplinaire a reçu le Prix à la création artistique du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ). Ce sont ses dizaines de réalisations qui lui ont valu ces grands honneurs. «Ils ont dit que j’étais littéralement un pionnier de la culture au Saguenay—Lac-Saint-Jean, c’est flatteur.»

Pierre Dumont se réjouit d’avoir la chance de pratiquer son métier dans la région : «J’ai joué dans des groupes de musique à Montréal, mais c’est différent. La qualité de vie en région est bonne.» En effet, il croit que la vie devient moins stressante, car la compétition est moins forte, malgré l’abondance de talent dans la région. «À Montréal, tu dois avoir un agent et faire des entrevues pour te vendre», ajoute-t-il. «C’est un vrai artiste! Sa diversité, sa sensibilité, sa proximité avec la nature et sa persévérance font de lui un artiste accomplit en région», témoigne M. Bouchard.

L’artiste prépare d’ailleurs un livre sur ses réalisations et ses expositions depuis 1978 : «Ça me demande beaucoup d’énergie, mais c’est une belle rétrospective à faire découvrir.»

 

Et lorsqu’on lui demande ce qu’il a laissé à la région jusqu’à maintenant? «On a tout laissé! Ça peut paraître prétentieux, mais c’est vrai… On était toujours le même petit groupe d’une dizaine de personnes et on a démarré presque toutes les corporations culturelles comme des centres d’artistes, des galeries, le festival Regard, le Côté-Cour», explique l’artiste. Il précise tout de même que bon nombre de jeunes ont pris ou tendent à prendre la relève dans ces réalisations. «On était une gang de vieux ‘’freaks’’ je pense», dit-il en riant.

 

Valérie Tremblay

Publié dans Les marcheurs de rêve

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<br /> Bonjour je suis possesseur d'une huile sur toile de P.dumont . Je peux envoyer des photos . Bien a vous gil 0609802742<br />