Ils ont dit
...Pour éviter de parler en termes de coupables, il est de bon ton de dire que l’homme, innocent, est poussé par le système qui l’opprime. Tel dirigeant nazi n’a agi que poussé par la mécanique du régime. Tel fonctionnaire ordinaire se cache sous l’intérêt supérieur de l’État. Tel paysan n’utilise les pesticides que parce qu’il ne peut pas faire autrement etc. Tout choix d’une histoire sans coupable est le choix d’une histoire sans sujet et en conséquence l’art lui-même quitte les êtres pour les choses… qui deviennent alors des coupables faciles, comme la télévision coupable d’abêtir l’espèce humaine.
Échapper à cette mort du sujet, ce n’est pas obligatoirement en re3venir à la religion du prisonnier. Ce n’est pas non plus cautionner aussitôt l’être en soi, à la fois dieu et démon, où l’être dieu et le social démon. La lutte des classes elle-même ne fabrique pas des coupables (les capitalistes) et des innocents (le prolétariat) Elle peut aussi d’ailleurs faire, à son tour disparaître le sujet pour masquer le système. Le système était bon, c’est Staline qui était mauvais !
La question du coupable conduit plus à la question de la justice qu’à celle de la morale. Or tout comme nous savons à présent où est le mal, sans bien discerner le bien, l’injustice révolte aisément, sans dire pour autant la justice !...
Jean-Paul Damaggio