J'apprends
En regardant le paysage
j’y cherche mes repères.
L’homme gagne à rester humble
face à la beauté du monde.
J’ignore tout de la vie.
J’apprends l’éclair et l’ombre
par la pupille et la paupière.
J’apprends la poussière et la peur
par le pas des fantômes.
J’apprends l’ignorance et la voix
par le savoir et par la gorge.
J’apprends les fers et la prison.
J’apprends l’enfer par les hommes.
J’apprends l’éden par l’amour.
J’apprends la main par la caresse.
J’apprends la haine par la guerre,
par le racisme et les drapeaux,
la pauvreté et la misère
par la richesse mal acquise.
J’apprends la pierre par la fronde.
J’apprends le mal par l’argent.
J’apprends la chair par la femme.
J’apprends la vieillesse et l’ennui
par la jeunesse et les hospices.
J’apprends la faim et l’abondance
par le pain sec et l’espérance.
J’apprends la fleur par l’abeille.
J’apprends l’oiseau par les oreilles.
Je prends la route par la main.
J’apprends la mer par les vagues.
J’apprends le ciel par le vent.
J’apprends l’écorce par la sève,
l’érable par le sucre,
le chêne par la planche
et le pin blanc par le cercueil.
J’apprends le corps et l’âme
par le mouvement et l’infini,
J’apprends l’éternité par les secondes.
J’apprends la chance et le destin
par le hasard et l’imprévu.
J’apprends les marches d’escalier
par chaque pas pour le monter.
J’apprends la cendre par le feu.
J’apprends la gifle par la joue.
J’apprends l’orgueil par la honte.
J’apprends la corde par le nœud
et le couteau par la blessure.
J’apprends la main par la caresse.
J’apprends la route par le pied.
et la lumière par la nuit.
J’apprends le monde par les mots,
la nudité par l’apparat,
la vanité par l’apparence
l’écharde par la peau,
J’apprends l’échelle avec la cage
par les barreaux
horizontaux ou verticaux,
l’acuité des réponse par la teneur des questions,
les tournesols par Van Gogh,
les mille arpèges du silence
par du Satie et les vieux blues,
la beauté des ombres par Rembrandt.
J’apprends la mort par la vie.
(…)