L'ultime montée de Maurice Richard
Encore une fois
du feu dans les yeux
tu prends la rondelle
au centre de la glace
en poussant bien des jambes
tu patines en ligne droite
le plus vite possible
jusqu’au but adverse
mais alors que tu traverses
la ligne bleue de l’ennemi
soudain tu ne vois plus le gardien
le filet disparaît
et la bande s’ouvre tout au fond
telle une immense bouche gourmande
au-delà de l’aréna
vers les rivières de l’enfance
des heures et des heures
jusqu’à ce qu’enfin
il n’y ait plus de foule
La rondelle sur la palette
tu patines toujours sans cesse
sur la glace infinie des mémoires
jusqu’à ne plus nous voir
et jusqu’à respirer enfin
l’air pur de la joie absolue
de patiner simplement à jamais
seul
les yeux dans les cieux
sans rumeurs et sans but
libre de toute entrave
Bernard Pozier