La pie (Suède)
La pie
oiseau d’humeur venteuse,
tourbillonne comme un hélicoptère,
boule d’ailes dans l’air.
La pie, veuve joyeuse, rit
malgré ses enfants misérables, rit
des larcins qu’elle a commis et de ceux qu’elle projette.
Oiseau noir et blanc des bouleaux,
elle est chez elle jusque sur les arbres qui restent noirs dans la neige.
Cueilleuse automnale de sorbes, mais sans corbeille,
sa poitrine d’acier brille comme le ciel clair de l’hiver.
Mais elle préfère à la forêt les fermes,
elle vole dans la fumée des cheminées, fleurant le lard grillé,
elle ramasse l’épingle qu’on a jetée avec l’eau du bain du dernier-né,
elle se pose sur la vieille pompe pour écouter le séparateur dans la
cuisine.
La pie, jeune fille rusée qui hoche la queue,
jamais tout-à-fait jeune ni sans expérience,
plutôt une romanichelle, une pièce d’argent à l’oreille,
facile à séduire dans le foin de l’arrière-hiver,
quand on a les pieds humides de pluie froide.
Jamais une vieille grincheuse comme la corneille,
jamais enrouée comme le corbeau, ce maquignon ambulant,
un couteau sous le manteau et du tabac dans la gueule.
Non, plutôt parente de la pauvre servante du curé
qui danse sur la glace
malgré ses gants troués.
La pie, avec son fagot et son bidon de lait qui grince,
habillée de blanc d’œuf en-allé, trempée dans le goudron des gouttières,
habite le pays des chaudes maisons de bois
où elle aiguise son bec à la meule
et rit avec dédain des garçons qui grimpent dans les arbres.
Artur Lundkvist