Top articles
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La Sûreté du Québec est une police politique
Depuis quatre ans, on devine les contours des systèmes qui ont permis à des entrepreneurs, des ingénieurs, des organisateurs politiques et parfois même des élus — au municipal comme au provincial — de faire rouler de sales combines lubrifiées avec l’argent...
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Un jardin
Il me faut un jardin pour ne pas mourir étouffé sous la mêlée des hommes – suffocante compagnie d’être trop exclusive. Ainsi, cette semaine, ai-je eu brièvement celle d’une fouine, venue l’autre nuit toquer au carreau du salon – nous avons échangé un...
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Le blanc des pages
Le blanc des pages laisse la liberté aux mots. Ce sont les mots qui se musèlent entre eux. Il m’arrive en marchant de rencontrer l’espace ou de croiser le temps. Les routes se cherchent dans les pas. Les traces de pas sont des sémaphores. Un œuf sort...
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Deux petites choses
J'ai gardé son permis de conduire après sa mort. Mon pouce traîne sur la surface lisse de la photo. Il me ressemblait au même âge. Il a vécu une belle vie, il a rendu plus de gens heureux qu'il n'en a rendu triste. Qu'est ce que cet homme a accompli ?...
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En enfilade
ils se suivent enchaînés les uns aux autres avec une pancarte où il est écrit devant "SANS EMPLOI" et derrière "JE NE SERS PLUS A RIEN" ils traversent la place du centre-ville yeux baissés vaincus parmi les vaincus en une lente et longue procession des...
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Quatre ans
Cela fera bientôt quatre ans on m’arracha à toi à mes camarades à mon peuple on me ligota bâillonna banda les yeux on interdit mes poèmes mon nom on m’exila dans un îlot de béton et de rouille on apposa un numéro sur le dos de mon absence on m’interdit...
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Fragile centaurée
Mon fils aubépine et ma fille fauvette ont fleuri en racines au ventre du dégel faisant battre à nouveau les ailes de l’aurore, la gorge bleue de l’air, le sainfoin de l’espoir. J’écris pour mériter un peu de leur lumière. Il suffit d’une étreinte pour...
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Renaître
Je sais faire tellement peu de choses : Même pas de pêches comme les pêchers Même pas de raisins comme la vigne Même pas de noix comme les arbres à ombre amère Et frémissement léger. Une seule chose je sais accomplir Avec une dextérité supérieure : Je...
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L'eau de la source
C’est l’automne. Le vent s’empale aux crocs des arbres laissant tomber leurs feuilles comme on enterre un os. La terre les dévore pour réchauffer sa chair. Déjà, les oiseaux ont crevé les yeux des tournesols et des épis de maïs. Les fruits gèlent sur...
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Le bleu de la nuit crie au secours
abîme je me ferai aile pour distancer la douleur à travers un nouveau ciel habité par les voyelles et les soleils rameurs nuit je m'éveillerai aurore jacassant sur la pierre Dans mon sang de feu vert on entendra peu à peu se taire les voix herbeuses des...
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Le squelette
Il est en moi, je le sais, bien qu’il ne souffle mot. Mais si je m’assieds, il se met aussitôt à l’aise, et si je cours il se précipite de même. Comme une ombre intérieure, il imite mes moindres gestes. Il ne me quitte jamais, je ne peux me séparer de...
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Un petit bol de larmes
Une main borde un clochard quand il rêve d’un lit. Il dort replié dans ses yeux pour protéger l’espoir. Un enfant quelque part réchauffe de ses doigts un petit bol de larmes. « Comment c’était déjà dans le ventre de maman ? » Le fruit retourne à ses racines...
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Le duplex
J’ai un étrange voisin. Heureusement qu’il vit seul. Il sort de ses gonds comme une porte en colère. Je l’ai vu s’acharner sur une table à grands coups de marteau, faire l’amputation des chaises, péter les boutons de chemises croyant qu’elles ont l’acné....
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Permis d'existence
Soudain la pendule s'arrêta. Tout le monde se retourna vers moi Ca y est, c'est mon tour ! On ouvrit une porte secrète un escalier dérobé on me jeta dans une calèche les poumons mouillés quand d'un coup je me retrouvai sous les étoiles de la ville peigné...
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Marie
Marie ! J’ai peur que ma mémoire perde ton nom, comme le poète craint de s’aliéner le mot que sa souffrance nocturne a fait venir au monde et qui par sa grandeur aurait égalé dieu. Ton corps, Marie, je l’aimerai et veillerai sur lui comme un soldat auquel...
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Le dernier poème de Jean Sénac
Il ne s'est pas enfermé pour écrire son poème a flairé le danger lui a laissé la porte ouverte Pas de poème sans risque Sa barbe lissait le pubis de la page transparente et ses lèvres murmuraient la sourate du pardon Il dessina d'abord un soleil un petit...
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Autrefois
Autrefois je marchais dans les rues de Marseille Avec AUDISIO avant d'avoir vingt ans ; Nous bâtissions le monde et disions des poèmes À haute voix jusqu'à trois heures du matin, Nous étions suivis par des agents de police Nous n'avions pas de sous pour...
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J'écris 5
J’ai mal du mal des hommes. J’ai bonheur quand ils s’aiment. Je défaille et m’agrippe. Je suis douleur et joie, l’avidité des feuilles qui s’ouvrent à la pluie, les yeux des tournesols tournés vers le soleil, la plongée des racines, le futur des fleurs....
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Un corps de papier
J’habille un corps de papier avec des robes d’encre que le regard dévêt. Le style, c’est la musique des phrases, leur boitement, leurs fausses notes qui chatouillent l’oreille, la douceur des consonnes, la dureté des voyelles, les dièses ou bémols de...
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Il y a des ombres
Il y a des ombres qui parlent mieux que des soupières Des ombres qui se promènent tout le jour des poissons sous les bras Il y a des hommes qui pensent à ce qu'ils feront demain Leur tête ressemble à une horloge bègue Leurs mains chaque doigt est un porc...
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Sur le terrorisme
Je me suis endormi au pied de cette grosse épinette noire qu’il y a tout juste à côté du mausolée où reposent les ossements de mes ancêtres. Je ne sais pas pendant combien de temps je suis resté endormi. Quand je suis remonté des couches profondes du...
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Je monte
Je monte, il n’y a plus de langue, le sublime dans ma voix vide. Il neige des nuits je perds la vie, je suis aux mots de la fin, une femme est mon sexe attristé, je trouve des squelettes dans la brise, je suis fait comme une fille. Comment prévoir la...
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La dimension métaphysique des odeurs
Les séquestrés dans les cachots portent le ciel en eux. Nous avons mis le temps dans une poche trop petite. C’est pourtant lui qui enveloppe les choses, qui infléchit les lettres, qui sert à coudre la parole. Je cherche dans l’espace ce qu’il faut pour...
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Je monte
Je monte, il n’y a plus de langue, le sublime dans ma voix vide. Il neige des nuits je perds la vie, je suis aux mots de la fin, une femme est mon sexe attristé, je trouve des squelettes dans la brise, je suis fait comme une fille. Comment prévoir la...
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Poème comme ça
J'écris rien que pour retrouver en quel lieu j'eus la révélation parce que j'ai oublié ce lieu ainsi que toute révélation. Alors selon l'usage Je célèbre l'inconnu pour tant bien que mal assurer mon existence. C'est l'utilité des fantômes que de figurer...