Toundra
Toundra de monstres dans les Torngats, sur la crête des montagnes nues comme dans le bouillon des cataractes roulant jusqu’au Grand Sud, là où toute neige fond toujours un peu trop vite
Toundra où les héros se suicident, appelés par un au-delà de troupeaux de phoques annelés et d’umimmaq en rut, alors que des goélands placides tournent et tournent autour d’arcs-en-ciel printaniers, attendant la désintégration des glaciels répandus entre les îles Mansel et Akpatok
Des morses aux longues dents donnent aux touristes en mal d’exotisme leurs plus belles défenses transformées en colifichets
Des armées d’ombles arctiques fouillent les eaux du détroit d’Hudson à la recherche d’uviluq et de bancs de crevettes
Et que disent donc les Inuits à propos de la toundra qui les nourrit nuit après nuit
Considèrent-ils comme valide la solution finale d’un grand suicide collectif avec en prime un tsunami-catastrophe
Ou gardent-ils foi en la puissance de guérison de cette toundra de pierres
rondes, de nirliit envoûtants, de tremblements sanguins et d’accouchements d’humains résilients capables de giguer tout en kayakant
Jean Désy