Porte ton coeur tout en haut de la falaise

Publié le par la freniere

Nombreux sont les renoncements que le rêve a transformés. Est-ce bien moi qui poursuis le chemin frayé dans l’absence ou bien est-ce seulement ma pensée défroquée qui longe cette forêt devenue un désert?

Nous ne sommes qu’un bruit qui court. La multitude est une bonne cachette. Que serait le «je» sans la correspondance du «nous»?

Dans le miroir de l’eau se cache le trouble reflet d’une blancheur sans écho. Tes cendres pour seules preuves de vie, je me relis sans me reconnaître. L’ombre de ton feu est arrimée à mon sang. Je ne te vois plus, tu es dans toutes les ombres. Les mains vides, j’arpente du regard la robe froissée que tu as laissée sur le cintre de l’armoire. Ma mémoire se consume et tu te dissimules. Je ne te sens plus, tu es dans tous les parfums.

Le cœur est à sec et les cailloux brillent dans un ciel désert, dans une brèche de silence. Tu t’es décollée du temps, mais quelque chose craque parmi la désincarnation de la lumière. Des jours blessés courent dans mes poumons. Les couleurs s’assèchent dans la tentative désespérée d’occuper les formes vides. La palette s’émiette entre les doigts du souvenir. Comme chaque fois, le soulagement file avec la béance de l’air. La fracture est un mouvement qu’aucune cicatrice ne peut souder.

Je suis un autre avec la prédominance de mes lacunes. Mais, je demeure identique à ce que j’étais dans un long couloir d’isolement où s’effeuille le temps.

Te voilà enfin, beauté endormie et flammes vacillantes. Nous voilà, couple à deux visages, sur le même chemin. Une louve au cœur fragile et une meute de rêves hurlants à l’intérieur de la colline, pain réuni sur de la braise, mer vagabonde sur la bosse du monde, baisers qui dansent comme un serpent au bout d’un bâton.

La clarté a surgi de la vie qui se précipite par-dessus l’horizon. Ballets d’âmes sœurs accrochées à la crinière du vent, nous courons après la valse d’émotions éternelles. Entends ma voix sur les radeaux du ciel. Porte ton cœur tout en haut de la falaise et marchons ensemble sur l’instant infini. Il pleut des comètes déjantées et nos cœurs sont nos derniers parapluies.

L’écriture est une étoile filante qui traverse notre chair comme un souffle soulève des feuilles mortes d’un point à un autre. J’ai pris du plaisir à extraire de moi les graines qui un temps ont germé dans mon jardin.

Le bonheur n’est-il pas ce qui est malgré nos défaillances?

L’amour est un miracle de jeunes ronces dont personne ne guérira jamais.


Bruno Odile -Tous droits réservés ©

 

Publié dans Poésie du monde

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