La vieille terre

Publié le par la freniere

Je suis l'oiseau brisé à l'aile, qui ne pourra plus jamais voler. D'un mot l'autre, je sautille de phrases brindilles au dénuement du texte. Plus rien ne résonne de mes gestes criant l'absence. Sur la terrasse où j'écris, je cherche ton fantôme, l'ombre de ta main s'occupant des plantes. Seul le silence dit la totalité du manque de ta voix. Je suis la vieille terre sous le soc, l'indigente d'un ancien bonheur. L'essentiel a plié son manteau, j'ai froid. Ni mort ni vivant, tu es là-bas entre les murs gris d'une grisaille encore plus grande, d'une raison même plus en équilibre. Le flux des voitures qui passent, indifférentes, c'est ton oubli de nous. Des bourgeons signent un essai de printemps, tu disais : "Les arbres sont les antennes du vivre". Je me souviens ta force tranquille révélant la beauté, propulsant l'existence. Je n'irai plus aux bois, aux joies, aux découvertes, la table du jour est vide maintenant. Tu m'as laissée seule prendre soin de la vie. Et je sais si mal tailler tes oliviers,  cette année il n'y aura pas de récolte.

 

Ile Eniger

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