Ne meurs pas
Ne meurs pas :
J’ai lavé la cuisine ce matin et elle est déjà sale
il vient de me pousser un onzième doigt ne meurs pas !
J’ai appris à manger la boue et le silence et je n’aime plus la musique et la musique ne m’aime pas il y a un manège dans la cour ne meurs pas ! il y a des chevaux de bois dans ma mémoire malade.
Ne meurs pas ! ne meurs pas le téléphone ne fonctionne pas encore dans le caveau de famille et les morts de toute façon s’y croisent les bras ne meurs pas : tu as oublié de fermer le gaz ta vie va encore déborder et tu vas me suicider une nouvelle fois ne meurs pas ! je n’en peux plus de t’aimer.
Je suis fatigué ne meurs pas car tu t’appelles Gaïa ma terre et c’est en toi que je renais j’ai acheté le journal ils en parlent ils disent que j’ai raison de t’aimer ne meurs pas ! ce n’est pas annoncé ce n’est pas en première page et je n’ai pas fini de t’aimer. J’ai réservé une table au Restaurant des Morts-Debout on y mange à l’envers sa propre vie en racines par les deux bouts je te le dis ne meurs pas il faut encore que je t’écrive et je n’ai pas commencé c’est tout juste si j’ai appris à t’aimer.
Ne meurs pas sans toi la solitude n’est pas solitude et je me vouvoie hors de moi dès que tu n’es pas là dis : ne meurs pas. Dis ne meurs pas quand même puisque je t’aime jusqu’à la fin de moi.
Roland Nadaus