Les soldats (Belgique)

Publié le par la frenière

3. LES SOLDATS

 

l’homme protestait

ils lui ont dit de se taire mais il a refusé

alors ils l’ont frappé

 

un peu plus tard ils l’ont arrêté

absurdement ils lui ont dit

de parler mais il s’est tu

 

il ne comprenait plus

et eux frappaient toujours

 

pour faire une exemple

ils ont arraché la langue

du chêne voisin

pourtant il n’avait rien dit

sa bonne santé les injuriait

 

si vous passez par là

son écorce vous le contera

avec ses impacts

vu qu’il n’a plus de langue

 

pendant ce temps

dans la clairière voisine

une bibliothèque flambe

 

les livres brûlent sans fin

comme l’histoire de l’homme

sans espoir

 

des livres flambent l’homme aussi

le chêne sagement saigne

 

sous l’ample tilleul des fous

ce n’est plus le simple qui dort

ni les enfants qui jouent

des soldats boivent et rient

avec sur les mains le sang du chêne

 

il est là retenant à grand peine

les bourgeons de sa langue neuve

 

car il parlera

l’imprécation mûrit

haute comme les flammes

d’une bibliothèque qui meurt

belle comme la plus grande colère

le plus beau poème

 

4. E = m . c²

 

tout est dans le souffle

je suis le  commencement

et la fin

dit le vent

le sacre et la reddition

 

en un même mouvement

j’attise ce qui naît

j’efface ce qui est

 

naître n’est que l’avatar du désir

corrompant mes lèvres

au lever du jour

 

mourir est plus simple encore

il suffit d’absence

 

la plèvre noire tendue entre les pôles

de l’espoir

ne dit rien d’autre

 

car

naître est une farce

 

qui est né ?

 

qu’il se montre celui-là !

Christian Andersen

 

Publié dans Poésie du monde

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