Jean-Michel Maulpoix
Né à Montbéliard, le 11 novembre 1952, Jean-Michel Maulpoix est l'auteur d'ouvrages poétiques et d'études critiques sur Henri Michaux, Jacques Réda, René Char, ainsi que d'essais généraux de poétique (entre autres : La Poésie malgré tout, La poésie comme l’amour et Du lyrisme). Son écriture, où dialoguent sans cesse prose et poésie, se réclame volontiers d'un « lyrisme critique ». Jean-Michel Maulpoix dirige la revue trimestrielle de littérature et de critique Le Nouveau recueil (éd. Champ vallon)
Il enseigne la poésie moderne et contemporaine à l’Université Paris X – Nanterre. Il a été président de la commission d’aide à la création poétique du Centre national du Livre jusqu'en mars 2003.
http://www.maulpoix.net
Pas sur la neige, Mercure de France, 2004.
Chutes de pluie fine, Mercure de France, 2002.
L’instinct de ciel, Mercure de France, 2000.
Domaine public, Mercure de France, 1998.
L'Ecrivain imaginaire, Mercure de France, 1994
Une Histoire de bleu, Mercure de France, 1992.
Dans l’interstice, Fata Morgana, 1992.
Portraits d'un éphémère, Mercure de France, 1990.
Précis de théologie à l'usage des anges, dessins d'Alecos Fassianos, Fata Morgana, 1988.
Ne cherchez plus mon cœur, POL, 1986
Emondes, première édition Solaire, 1981 & Fata Morgana, 1986.
Dans la paume du rêveur, Fata Morgana, 1984.
Un dimanche après-midi dans la tête, P.O.L, 1984 & Mercure de France 1996 (édition nouvelle).
La Parole est fragile, Imprimerie de Cheyne, Le Chambon sur Lignon, 1981.
&
Ils déménagent tout le ciel bleu, en chiffons dans leurs malles d’osier
Les allers-retours de leurs rêves.
Et le gros édredon de laine, bourré comme un nuage qui va pleuvoir
Le ventre rond de la femme bouge.
La terre tourne un peu dans ses yeux
Ils ne disent rien, ne vont nulle part
Ils s’asseyent ou restent debout au coin de la rue, serrés les uns contre les autres.
&
Il taille, il coupe, il accentue. On le croise au jardin. A l’heure de brouillard. Ou plus tard dans la chambre. Ici et là, les mêmes gestes. Des chutes ou des bouquets de phrases. Parfois il retourne la terre. En mottes noires et brillantes. Des strophes pourrait-on dire. De brefs paquets de prose. Il taille, il coupe, il accentue. A la plume. Au couteau. Au sécateur. Aux ciseaux. Au plantoir. Au cordeau. Dans le jardin de Jean Tortel ou dans le pré de Francis Ponge. Ecrire est une affaire de main. Il taille dans le noir. Il découpe les ténèbres.. Il voudrait y voir clair. Dans cette langue dont on ne sort pas. Il taille, il coupe, il accentue. Il borde et déborde nos phrases. Il marche sur la grève à la frange de l’eau. Ou vers l’à-pic de la falaise. Sur la terre comme au ciel toujours sur un fil. Prêt à se jeter dans le vide. Désireux de voir la limite. Ce qui nous lie et nous sépare. Ce qui nous garde suspendus. Il taille, il coupe, il accentue. Dans l’entre-deux qui est le nôtre. Dedans-dehors. Une page. Une peau translucide. Ce sont toujours de frémissantes surfaces. Un ventre de femme où dort un enfant. Y coller l’oreille. Y poser la bouche. Il taille, il coupe, il accentue. A la finitude il prodigue ses soins. Il aime ces mourants que nous sommes. Avec douceur. Avec effroi. Il voudrait rassurer un peu cette agonie. De fleurs ou de musique. « Voici mon cœur » dit-il. « Ne le déchirez pas ». Il taille, il coupe, il accentue. Quoi d’autre ? Ce travail-là n’en est pas un. Il ne rapporte pas. Il ne remplira pas son outre de vin, son panier de fruits, non plus que sa besace. Il y donne de son temps. Le monde change de figure. Autrement métré et coordonné. Il taille, il coupe, il accentue. Il tisse un habit de haillons. Nous revêt de toiles d’araignée. Un habit qui ne dissimule pas la nudité. Qui montre que le corps a froid. Il taille, il coupe, il accentue. Autrefois debout. A présent penché. Son dos se voûte. Il regarde dans le jardin des combats de fourmis. Il ne tient plus tête à ses astres. Il taille, il coupe, il accentue. Il aurait bien voulu planter. Mais la terre est trop froide. La saison trop tardive. D’ailleurs il se pourrait qu’en dépit de ses soins l’ancien jardin redevienne un morceau de terre aride. Un roncier impénétrable. Il taille, il coupe, il accentue. Tant d’autres dont la sourde oreille. Et vivent les yeux fermés. | |||
&
L’espoir luit comme un brin de paille
Comme une étincelle d’or sur les neiges d’antan
Comme les voiles au loin descendant vers Harfleur
Jusqu'à l’autre océan où la splendeur éclate.
L’espoir luit comme cette eau courante
Qui baigne les mains silencieuses
Traçant de lentes lignes claires.
extrait sonore | ![]() |