Anise Koltz

Publié le par la freniere

 

Née le 12 juin 1928 à Luxembourg-Eich.
Fondatrice et organisatrice des Journées de Mondorf (rencontres internationales d'auteurs et de poètes, 1963-1974).
Membre de l'Académie Mallarmé, Paris, du Pen-Club de Belgique, et de l'Institut Grand-Ducal des Arts et Lettres.
Elle vit à Luxembourg et écrit en trois langues


Chants de Refus I poèmes, 1993
Chants de Refus II poèmes, 1995
Le mur du son
poèmes, 1997
La terre se taît
poèmes, 1999
Le cri de l'épervier
poèmes, 2000
Le porteur d'ombre
poèmes, 2001

L’avaleur de feu
poèmes, 2003
Béni soit le serpent
poèmes,2004

 

QUELQUES POEMES DE "LE MUR DU SON "

EXTRAITS DE LE MUR DU SON

Dépassant le mur du son
je me libère de toute mesure
la voix perd la parole


* * *

Le poète
devenu l'homme
qu'il ne voulait pas être
vend au rabais
une vérité sans loi


* * *

Il existe des mots
rapides et agressifs
comme des busards

Au lieu de s'élever dans le ciel
ils foncent dans l'herbe
pour déchiqueter leur proie


* * *

Quand j'écris
la page se referme sur moi

Je vis à la mauvaise époque
au mauvais endroit
j'écris dans la mauvaise langue

Je m'affole dans ma cage de papier


* * *

Écrire contre la mort
même si la bataille est perdue d'avance

mes mots prêts à frapper
tentent de capter
des fragments de vie


* * *

Tout poème est sans réponse

Océan sans fin
il se noie
dans un coquillage


* * *

Mes poèmes
des fourmillières

parmi les paroles noires
et grouillantes

des reines fécondes
des milliers d'ouvrières sans ailes


* * *

En relisant mes poèmes
je vois des mots cassés et déformés
comme les arbres d'un verger
ravagé par la tempête


* * *

Il y a un peu de neige
entre mes paroles

Mais la mare est noirâtre
d'où je retire parfois un mot
ressemblant à la réalité


* * *

Je t'offre un poème
comme un verre d'eau

Il ne désaltère pas -
Il te présente un lac
où tu couleras à pic


* * *

Parfois je ramasse
un poème blessé
qui meurt
entre mes mains

Je l'enterre

Et ma solitude s'accroît


* * *

Haletant
de page en page
le livre me parle
à voix basse

Avec du poison sur ses lèvres
il m'insuffle sa mortalité


* * *

Le monde m'a légué
un réservoir de paroles
qui s'épuise rapidement

Avec ce qui reste
j'attends qui ou quoi
me tuera


* * *

Je n'invente pas le poème
il existe quelque part
dans l'univers
ou pend hors d'un rêve
tel un micro cassé


* * *

Aujourd'hui
rien ne se passe dans mon écriture

Comme la neige qui noircit
sous nos pas
le papier se couvre de traces
qui mènent nulle part
pas même à la mort


Anise Koltz

 
 

Publié dans Les marcheurs de rêve

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