Des petits rien de la campagne électorale

Publié le par la freniere

Je ne suis pas étonné par les sondages qui donnent le Parti libéral comme gagnant le 7 avril prochain. Le PQ, porté par la charte de la laïcité, a cru que cela lui serait suffisant pour remporter les élections. En déclenchant des élections anticipées (alors qu'il avait présenté un projet de loi pour "des élections à dates fixes"), le PQ manquait à la parole donnée. Sur le plan de ce qu'on appelle l'éthique, ce fut là une première erreur de droit.

 

Une deuxième erreur me paraît encore plus significative: le couple Marois-Blanchet devait comparaître à une commission pour qu'on aille au fond des choses dans l'affaire de ce "fameux deal" qui aurait avantagé Claude Blanchet grâce à quelque prétendu magouillage avec la FTQ. Une élection anticipée permettait au couple Blanchet-Marois de faire le silence là-dessus. Avec le résultat qu'on connaît: une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la campagne électorale et qui a forcé le PQ à y aller pour ainsi dire de main morte avec "la question éthique". Le chef libéral s'est servi de cette épée pour faire de l'intimidation auprès de Madame Marois: "Mettez en cause mes prétendus manquements à l'éthique... et je vous ferai voir les as que j'ai dans mon jeu." L'as de trèfle, ce ne pouvait être que ce fameux "deal" du couple Marois.

 

Une troisième erreur: ne pas attendre que la Commission Charbonneau nous dise ce qu'il en était avec la corruption des partis politiques, leur financement illégal, et la collusion entre les entrepreneurs mafieux avec le gouvernement libéral de Jean Charest, au moment même qu'elle allait en faire le dévoilement, est une aberration stratégique capitale. La Commission a dû suspendre ses travaux alors qu'elle devait enfin mettre à jour cette corruption et cette collusion.

 

Une quatrième erreur: une campagne électorale menée totalement par Pauline Marois, au détriment de ses ministres et de ses députés, pourtant jeunes et déterminés... face à une équipe libérale beaucoup plus âgée. Lise Payette aurait pu mener une telle campagne: charismatique, bonne oratrice, de grand jugement, rapide dans l'attaque et la défense, ça aurait été une toute autre histoire si, en son temps, elle était devenue chef du PQ. Une Mère, mais une vraie (et je le dis d'autant plus sincèrement que tout le monde sait qu'il m'en a coûté très cher de m'être opposé à elle.

 

Une cinquième erreur: l'annonce de la venue de Pierre Karl Péladeau au PQ... à la sauvette. Jamais rien vu d'aussi mal improvisé que cette annonce. Plutôt que de jouer son atout de façon ordonnée et stratégique, le PQ a brûlé un as par une pseudo stratégie de "deux de pique". Et le résultat fut de perdre sa carte "frimée"... exemple parfait de la méconnaissance qu'en haut lieu péquiste on a du peuple québécois. Si nous aimons les gagnants, ceux qui ont fait fortune comme entrepreneurs, notre passé judéo-chrétien nous empêche d'en faire nos complices. L'envie, la jalousie et l'infériorité nous éloignent d'eux, sauf sur la scène fédérale. Là, on les applaudit, nos richards: de Pierre Elliott Trudeau à fiston Justin (qui résonne mais ne raisonne pas), baisage de mains et de pieds, à-plat-ventrisme, mets-en, ce n'est pas de l'onguent! Conclusion: au Québec, on a toujours préféré les "deuxièmes" aux "premiers". Imaginez que René Lévesque aurait été le premier ministre du Canada et Pierre Elliott Trudeau celui du Québec. Pouvez-vous douter un seul instant que la partie ne se serait pas déroulée autrement?

 

Henry David Thoreau a dit de nous que l'Église catholique nous avait privés d'une valeur fondamentale: celle de la spiritualité... qui n'est pas autre chose que la capacité d'échapper à la superficialité des choses, aux lieux communs et aux attrape-nigauds. Wilfrid Laurier a ajouté que nous étions un peuple d'émotions, et que celles-ci ne cessaient pas de changer parce que nous refusions "l'idée". C'est-à-dire encore, ce qui s'appelle la spiritualité - l'obligation de penser.

 

"Bienheureux les pauvres d'esprit!" clamaient nos curés du haut de la chaire. "Bienheureux les pauvres d'esprit, car ils verront l'Odieux... mille excuses: car ils verront Dieu!"

 

Pour ma part, j'ai un peu, pas mal, beaucoup de dificulté à admettre que ce Dieu-là, que cet Odieux-là puisse s'appeler Philippe Couillard!

 

Victor-Lévy Beaulieu

Publié dans Glanures

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