Jean-Pierre Spilmont

Publié le par la freniere

Jean-Pierre Spilmont vit en Savoie.
Il a été producteur d’émissions et auteur de dramatiques-radiophoniques sur France Culture et à la radio suisse Romande.
Il est l’auteur d’essais, de romans, de nouvelles et de théâtre.
Il a été lauréat de la Fondation de France, de Lettres Frontière et a reçu le prix du Livre d’Histoire de la Société des Gens de Lettres .
Il a résidé entre autres à La Chartreuse de Villeneuve les Avignon, à Loos en Gohelle, Scène Nationale 2004/2005 invité pour une résidence à la Villa Mont-Noir.
Il a publié à ce jour une vingtaine d’ouvrages

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poésie

  Lumière des mains suivi de L'incessant tourment d'espérances, cadex, 2005

  Retable, éd. Les déjeuners sur l'herbe, 2005

  Un instant de sable, calligraphies de Denise Lach,Terres d 'écritures, 2002

  Une Clarté de Passage, Cadex, 1996

  Lumières des mains, Cadex, (4°édition) traduction allemande deR Fisher, Verlag im Wald, 1995

  Dans le désert du sang, L’envol, 1994

  Les lamentations d’Asnatée, Le Verbe et l’Empreinte, 1989

  Cicatrices du Silence, Le verbe et l’Empreinte, 1985

  L’Autre Je, Fagne, 1975

  L’Orée, la déchirure, poèmes, Rougerie, 1971

  Moraine Absolue, poèmes, Rougerie, 1970

  Lisières, poèmes, Rougerie, 1969

Romans, essais

  Cinéma Muet, La Passe du vent, 2004
Chroniques de rêve, Comp’act, Photographies Lionel David, 2002

  Soleils Nomades, Flammarion, 1985, réédition 1998 et 2000 aux éditions la Passe du vent,

  Jours tranquilles à Vinsobres, chronique d’une résidence, La passe du vent, 2000

  La traversée des Terres Froides, Paroles d’Aube, Livre lauréat Lettres Frontières, 1999

  Jacques Balmat dit Mont Blanc, Albin Michel, Prix du livre d’Histoire de la SGDL , 1987, réédition en 2003 aux éditions Guérin

  La vallée des Merveilles, Attinger, 1985

Théâtre
Little Boy-Manatthan, La Main Multiple, 2005

  L’hiver nous descend lentement sur l’épaule, création au théâtre de Thiers, 2002
reprise à Mouscron, Belgique dans une mise en scène de François Vandorpe, 2004
reprise au théâtre de la Croix- Rousse, à Lyon, dans une mise en scène de Martine Van de Peene,2003

  Pinocchio e il filo del cuore, créé au théâtre Laudi à Florence, Cie Occupazione Farsesche, 1998

  Beatrice et Francesco, oratorio, musique de Giovana Marini, 1996, création Montpellier théâtre le Chai du Terral

  Les Lamentations d’Asnatée, texte pour une cantate, création à Lyon , chœurs et orchestre de l’IUFM, 1996

  Il fallait inventer la mer, en résidence à la Chatreuse de Villeneuve les Avignon créé au Festival d’Arrezzo 1996, 1995

 

 

 

Une part d’étincelles

 

Il faisait très froid sur le fleuve

Un cargo rouge

Avançait lentement.

La dérive des glaces était comme  un signal.

Ou comme une prière

 

J'ai perdu le chemin par où je suis venu

et vous avez disparu peu à peu

comme un très léger refrain

qui lentement s'efface

et finit par s'éteindre

sur les lèvres du passé.

 

La douce morsure des arbres montait avec l'hiver

et j'avais à nouveau perdu la mémoire de mon âge

en murmurant la longue litanie

des villages entrevus

J'ai entendu les heures se froisser une à une

avec  un soupir d'aile.

Un soleil  froid fondait doucement

dans la glace du fleuve, sur la rive duquel j'aurai aimé vous voir courir

quand vous étiez enfant.  

Puis,

ce fut comme s'il neigeait dans ma tête

en attendant que le jour se lève

et que le bruit que font les villes

nous réveille

enfin.

Pour quelques heures

Ou pour longtemps.

 

La neige vacillait comme une lumière de bougie, comme

un flamboiement de chandelle

pour éclairer le contour d'un visage.

 

Quelques uns s'étonnaient de nous voir dispersés

en quête

de  nous ne savions quelle aurore,

ne sachant ce qu'il adviendrait

quand le vent tomberait, ou

quand l'épinette blanche abandonnerait son ombre

aux mésanges.

 

Ne sachant ce qu'il adviendrait

quand les enfants d'ici n'attendraient

plus rien d'autre

que de sentir couler

sur leurs joues

des  fragments d'histoires oubliées

capables de réveiller le vieil hiver

à l'autre bout du  fleuve

ou de la mer.

 

Ne rien toucher.

 

Regarder seulement le ciel

ou ce qu'il en reste

et rejoindre la minuscule clarté d'un refuge, là,

où d'autres voyageurs, avant de s'éloigner,

 ont préparé  quelques bûches

à l'attention du nouveau venu

qui n'a jamais eu de visage

 

On se croise.

On se croisait depuis longtemps déjà.

Aux angles des rues fantômes qui

débordent de pluie et de nuit.

Pourtant,

 nous nous reconnaîtrons peut-être un jour.

 

Mais  ne répondez pas à mon appel si je vous fais le moindre signe

aujourd'hui.

Votre regard ne me serait rien d'autre  qu'un sursis et

vous ne reconnaîtriez qu'un

brouillard anonyme,

solitaire,

montant sans bruit au ras des heures

 

Lorsque je m’éveille, parfois,

Il ne reste rien sur  la page

qu’une fine couche de cire.

Un désespoir d’outre-ciel,

Un parfum  de bougie morte.

 

J’avais oublié le premier feu des hommes

J’avais oublié que seules les femmes

en étaient les gardiennes.

 

J’ai supplié qu’on me  garde

une part d’étincelle.

Une seule.

Pour le dernier convive.

 

Jean-Pierre Spilmont

 

Québec, L’Ile d’Orléans

Un matin de décembre 2005

Publié dans Les marcheurs de rêve

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