Libérer la parole

Publié le par la freniere

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On peut remarquer que poésie et médecine font bon ménage dans l'histoire littéraire. On songe à Breton bien sur, mais aussi à Victor Segalen, à Carlos Williams, à Lorand Gaspard plus près de nous. Pour ma part, je dois préciser que je me suis vite spécialisé dans la neurolinguistique et les troubles du langage. Ce n'était donc pas si éloigné de l'écriture.

 

Le langage, c'est toute ma vie. Professionnelle d'abord. (…) En tant que médecin, je n'ai pas cessé d'essayer de libérer la parole, je n'y suis pas toujours parvenu mais quand un enfant, au bout de mois, d'années de traitement, recommençait enfin à parler, à sortir de sa prison de mutité, je crois que je faisais œuvre aussi de poète.

 

S'agissant de l'exil, je ne suis pas à proprement parler un opposant. Je suis parti parce qu'il n'était plus possible de travailler à Haïti., à faire ce que j'aimais. Je savais aussi que tôt ou tard le régime de Duvallier viendrait me chercher dans mon école, mais je suis parti avant que cela n'arrive.

 

Je retourne quelquefois en Haïti, mais là-bas je ne suis rien, personne ne m'y attend, ne m'y connaît . En réalité, je pense que je n'y suis pas le bienvenu. Tous les exilés connaissent cela … Pour ceux qui sont restés, nous sommes un peu des fuyards, des déserteurs, nous n'avons pas vécu ce qu'ils ont vécu, notre vie souvent a été meilleure, et on nous le reproche, plus ou moins ouvertement.

 

Je rêve en créole, je le parle couramment, mais non je n'écris pas en créole. Ce n'est pas une langue écrite, c'est la langue du peuple, elle est par nature, par l'histoire, uniquement orale. Ecrire en créole pour moi serait un artifice, une posture, presque une imposture.

 

- Ce qui est paradoxal, c’est qu'en écrivant en français, vous inventiez une poésie très orale …

 

C’est la preuve que je n'ai pas besoin du créole pour parler au peuple et que les formes traditionnelles françaises et européennes me permettent tout à fait d’exprimer ce que je veux dire. Oui Voix nègres, voix rebelles a une fonction didactique : j'ai voulu rendre hommage à quelques grands hommes de l'histoire noire et faire connaître leur vie …

 

- On remarque à ce propos que dans Voix nègres, voix rebelles, parmi tous les Noirs, il y a une fève, un Blanc, tout seul : Che Guevara.

 

Son influence sur la Caraïbe et toute l’Amérique latine est immense. Son combat n'a pas de couleur. Che Guevara aurait mérité d'être noir, il l'est à titre honorifique. »

 

Jean Métellus

Publié dans Les marcheurs de rêve

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