Paroles indiennes
Joséphine Bacon est Innue de Pessamit. La poésie et la tradition orale de son peuple la suivent depuis son enfance. Sa poésie au quotidien s’adresse à la mémoire collective, à la nature débridée, à la sagesse, et aux ancêtres. C’est dans l’oscillation entre le langage universel sur l’origine du monde et la quête personnelle d’identité et de liberté que Bacon nous rappelle et nous ramène à nous-mêmes. Elle vit à Montréal.
Le Nord m'interpèle
Ce départ nous mène
vers d'autres directions
aux couleurs des quatre nations :
blanche, l'eau
jaune, le feu
rouge, la colère
noir, cet inconnu
où réfléchit le mystère.
Cela fait des années que je ne calcule plus,
ma naissance ne vient pas d'un baptême
mais plutôt d'un seul mot.
Sommes-nous si loin
de la montagne à gravir ?
Nos soeurs de l'Est, de l'Ouest,
du Sud et du Nord
chantent -elles l'incantation
qui les guérira de la douleur
meurtrière de l'identité ?
Notre race se relèvera-t-elle
de l'abime de sa passion ?
Je dis aux chaînes du cercle :
Libérez les rêves,
comblez les vies inachevées,
poursuivez le courant de la rivière,
dans ce monde multiple,
accommodez le songe.
Le passage d'hier à demain
devient aujourd'hui
l'unique parole
de ma soeur
la terre.
Seul le tonnerre absout
une vie vécue.
Joséphine Bacon