Vive-eau
Une eau native m'a trimballée d'îles en rochers, de vessies en lanternes, de larges en rades, de tout en rien et son contraire. Escales aléatoires, j'ai jeté l'encre et le papier. Brins, fétus, têtus, billets sans cesse froissés, mouillés, dilués, engloutis. Rêves et mains décapés jusqu'à l'os, j'ai écrit tous les vents sans en perdre le cap, brisé tous les silences pour n'en garder qu'un seul épaulant bien la lame pour mieux lui résister. Marée de vive-eau, une houle de fond emporte le bateau, les ports, les ponts, les terres et les cahiers. Dans la course improbable, une câle de mots convoite le soleil. Il n'y a pas de lieu, seulement un état, l'étarque d'une voile qui court sans cesse après son horizon.