Le matin tousse

Publié le par la freniere

Les mots tombent dans le grand blanc et noir. Les abîmes grandissent quand les ailes doutent. La souffrance de la solution est parfois plus grande que la douleur du problème. Mes phrases se tiennent par la main comme des pas frileux sur un chemin aléatoire. Il faut sans cesse détecter l'étincelle, inventer la couleur. Il faut peut-être toute une vie pour que le tournoiement du poème prenne sens. À deux pas de la solitude et des interrogations, quatre marrons au fond des poches pour trésors, des enfants jettent leurs cris d'hirondelles sur les chemins d'automne. Les platanes quittent leurs corsets d'écorces, époussètent leurs feuilles jaunies fatiguées d'avoir joué les éventails à la saison brûlante. Des feux de jardins délivrent des messages qu'ignore l'application du jardinier. Les maisons ont fermé leurs fenêtres, la buée nostalgique. Le chat remet de la fourrure sous l'œil du soleil pâle. La terre se repose des outrances d'été. Encore quelques oiseaux s'égosillent au portant d'une lumière rousse. Tout est bien. Et si le matin tousse, c'est que les cheminées s'essaient aux premières flambées, rien de bien grave. Accrochée à une herbe ballottée par les vents, ma main convoque l'écriture, truite vive depuis tant d'années.

 

Ile Eniger

Publié dans Ile Eniger

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