Difficile
Difficile d’aimer l’homme en treillis de combat,
la fillette en poupée,
le môme qui fait l’homme.
Difficile d’aimer
l’homme quand il compte ses sous,
tuant l’air qu’il respire,
saccageant la forêt,
affamant l’océan,
mettant l’espace en cartes
et l’espérance en berne.
Difficile d’aimer l’homme
quand il lance des pierres au lieu de caresser,
transformant la terre des ancêtres en cimetière d’autos,
l’œuf de Colomb en grippe aviaire,
l’herbe folle en vache folle
et les bonhommes de neige en oxyde de carbone.
Difficile d’aimer la femme
grimpant l’échelle sociale sur la hauteur des talons
et l’échelle d’un bas,
transformant la tendresse en argent,
le cœur qui pique en château de cartes
et le sexe en tirelire.
Difficile d’aimer l’acteur
quand il renie Gauvreau
pour jouer le bleuet dans un bol de céréales,
le peintre quand il peint avec un signe de piastre.
Difficile d’aimer Dieu
transformant l’air en or,
la prière en pétrole,
la sourate en diktat,
l’espérance en djihad,
la caresse en enfer,
le visage en burqa,
le missel en mitraille
et la marelle en roulette russe.
Le temps se perd dans le zapping,
l’espace dans le zoom.
La force de la poésie est dans sa liberté.
Elle préfère les faux pas aux bêlements des foules.
Enfant impitoyable,
sa rectitude se tient debout entre ses lignes,
loin des lignes de parti,
des lignes éditoriales,
des lignes de montage,
des lignes blanches
et des colonnes de chiffres.
Jean-Marc La Frenière