Du miel pour les ours
Enjambant les troncs d'arbres, les jambes des clôtures, les épaules de pierre, Richard Gamache touche du doigt le dard des abeilles dans la vulve des fleurs, la tapisserie des mûres que protègent les ronces. Poète, chanteur, musicien, conteur, Richard Gamache ne compte pas ses mots. Sa parole généreuse farfouille le ventre de la vie. Sous ses jeux de mots se cache une pensée profonde. Parmi tous ceux qui rasent les murs, il saute la clôture. De l'humour à l'amour, il dit la vérité. Ses bulles de savon, ses bulles de savoir nous sauvent de l'ignorance crasse. Il m'apprend à écrire avec l'espérance qu'un téléphone sonne ou qu'on frappe à la porte. Il y a chez lui des mots comme des pommes au pommier, du miel pour les ours. Richard Gamache a le cœur en nage dans la mer des mots, le cœur à la bonne place, les phrases entre les dents et la guitare d'un stylo entre ses mains d'artiste. Sa diversité de styles n'est pas surprenante, elle implique une saine curiosité. Il mord dans la vie avec ses dents de lait et recrache les noyaux avec ses dents de loup, pénètre le silence d'une neige verbale, mange les mûres du bec d'un oiseau, cueille les fruits dans le verger des heures. Il ne faut pas se fier à la longueur des phrases, du soleil se lève dans les petites lumières. Entre Gamache et ses grimoires, entre ses mots et ses jeux de mots, entre les buts et les rébus, entre les notes, il y a Richard, il y a l'âme, le sens derrière les phrases, le sang derrière le chant, il y a l'homme debout. C'est lui que l'on peut lire ici. Ses mains sur un manche de guitare sont comme les phrases de ce livre. Ses mots saignent et ses blessures parlent. Le temps remue sa langue dans le sang des syllabes. Salut Richard! Nous sommes plusieurs à t'écouter. Salut Richard dirait Ferré, un dernier verre pour la route, un autre vers, un autre livre pour la suite du monde.
27 septembre 2017
Jean-Marc La Frenière