La maison de l'être

Publié le par la freniere

La vie c’est un baiser que les lèvres dessinent,

le crayon dénouant le fil de la parole,

le fil rompu du temps que les aiguilles affolent,

la sève qui germine dans la boue des labours,

le pain qui lève dans le four,

l’orage qui soulève le vent du Wyoming,

ce sont les éléments qui composent la vie,

le bleu du ciel, le rouge des joues,

le vert de la flore qui colorent le monde,

le pointu des sapins, la courbe des collines,

la langue du pays que parle chaque atome,

les sauts de saumon dans l’argot des rivières,

le vocabulaire des érables,

l’alphabet des étoiles,

la morsure des ans et l’usure des choses,

les fleurs de romarin que les abeilles tètent,

les poules qui picorent les graines qu’on leur laisse,

les vers qui se dressent pour boire l’eau de pluie,

les microbes, les virus, et les antipoisons,

la rosée du matin et la brume du soir,

les battements du cœur dans le tempo des nerfs,

les frissons, la chair de poule et les poils dressés,

c’est la force du oui dans l’étiolement du non,

les galets ricochant sur le lac,

l’eau fraîche des eskers, la glace des icebergs,

les pointillés du temps entre les parenthèses,

la marée des virgules dans les textes anciens,

le cœur tombé dans l’herbe comme une fleur des champs,

le sucre du sureau et le parfum du thym,

le jardin qui jaunit après tant de couleurs,

les feuilles ratatinées sous l’auvent de l’automne,

le museau de la biche, le cuir des épaulards,

les épaulettes du vent sur le dos des collines

les sursauts du navire dans le naufrage du monde,

les choses de l’enfance parmi les vieux jouets,

le regard posé sur la beauté du monde,

le feu des allumettes, le courage des mains,

les biceps des mots, les muscles du silence,

les étoiles qui brillent sur la toile noircie,

les marins qui se noient à l’appel des sirènes,

le rire des ados dans l’essaim des Vespas,

les rots de l’ivrogne et la broue dans le toupet,

les fanfreluches et les frous-frous,

les flots, les vagues et les rapides,

la braise sous la cendre et le feu sous la glace,

c’est l’âtre qui s’allume dans la maison de l’être.

Jean-Marc La Frenière

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article