La fiancée bleue (France)

Publié le par la freniere

À René Char

Qui va là ?
charbonnier sans foi ou poète
insouciant de nature

ou natif du torrent et des pierres

 
est-ce un guetteur
un guerrier d’exil

un derviche qui fait tourner la terre

aux plus de son manteau ?
 
celui-là passe dans sa parole
si profond qu’il y voit
le souffle du miroir
et l’éclat d’une fée
comme une aube à toute heure
du jour et de la nuit
 
natif du torrent et des pierres
insouciant de nature
poète ou charbonnier sans foi
il va
 

Poète par le temps accordé à la flèche

par le choix des armes
par le rêve des cascades
en ses doigts de sourcier
 
poète par le midi farouche
par les guêpes et les lavandes
par le muscat où s’éveillent
les filles du soleil
 

poète par le sable ailé du présent

par l’envers des traces
par la magie du roc
et du doute
 
poète par l’écorce des arbres
par la mort endormie
par la migration hasardeuse
des papillons du Ventoux
 
poète par le socle de ses poings
 
La terre était bleue
et belle comme une fiancée
mais elle ne retenait pas
celui qui s’éloignait
 
et celui-là tenait
une ombre froide au cœur
ombre portée de la belle

ombre sans ombre de la fiancée bleue

qui toujours se taisait
 
et gelaient l’amour et la lumière
goutte à goutte en son cœur

tandis qu’il fuyait par la route des étoiles

à la vitesse de la lumière
à la vitesse d’un éclair noir
 
la terre était bleue
et belle comme une fiancée
mais elle ne retenait pas
celui qui s’éloignait
 

André Velter

Publié dans Poésie du monde

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article