Ton odeur

Publié le par la freniere

Ton odeur, je l’ai gardée entre mes draps. C’est assez pour contrer le malheur. Nous chahutons le temps à force de caresses. Nous sommes la base et le sommet, les pointillés d’un trait qui n’en finira pas de conjuguer l’amour. Nous échangeons nos verres, nos hivers, nos bouches. Le plaisir de l’un devient celui de l’autre. Nous sommes assis sur le rocher du rêve, les pieds ballants comme des phrases. Sans que tu m’aperçoives, je te mange des yeux. Parmi les bruits du monde, mon oreille n’entend que toi. Ton rire me soutient dans l’exil des choses. Ta transparence m’agrandit. Il y a en moi un tel désir de toi que je brise les murs, que je casse les briques, que j’allume le feu avec un bras de neige. Je t’aime et je voudrais que les mots entre nous soient plus près que les os. J’écris pour te couvrir de caresses.

Je ne vais plus nulle part, c’est vers toi que je marche. Je me mène où tu es. Je me regarde en toi. Les choses tiennent ensemble par nos regards unis. Mes pas sur ta route sont des ailes, des battements de cœur, des gestes de lumière nettoyant l’horizon. Tu donnes à mon sourire l’immensité confiante de l’instant. Ta fenêtre s’éclaire. J’y monte par les longues jambes du lierre. Je te regarde sommeiller dans un rayon de lumière, mordre la pomme du rêve de ta bouche gourmande. Tu t’éveilles comme une fleur s’égoutte après l’averse. J’y lape la rosée jusqu’au petit matin. Sur la page du lit, nous formons une phrase plus grande que la vie, plus immense que tout.

Il peut pleuvoir longtemps, neiger sans discontinuer, il fait toujours beau chez toi. Le soleil t’habite de l’aube jusqu’à l’aube. Je laisse toujours un carnet ouvert pour t’écrire. Il y a partout de je t’aime, des cœurs, des sourires dans la marge, comme des miettes d’étoiles parsemant la nappe fraîche du soir. Il y a tant de vie dans tes bras, tant de force dans la fragilité. Il y a tant d’amour quand nos corps se touchent, quand nos regards se parlent, quand nos mots se rencontrent. Chaque matin, ton  parfum tartine mes rôties. Je te goûte en mangeant. Le soir, ce sont tes bras qui s’ouvrent dans mon lit, ton cœur qui m’habite, ton corps qui bouge dans mes rêves. Il est minuit. Les chats sourient. Je ne dors pas. Je pense à toi. Il est trois heures. Les chats sont gris. Je ne dors pas encore. Je pense à toi. Je pense à nous. Je panse l’espérance avec ton odeur. J’écris je t’aime dans ma chambre au deuxième. Je crie je t’aime sur le sentier qui mène au lac. Je dis je t’aime tout coupant du bois. Que tu y sois ou pas, je mange toujours à tes côtés.

La neige peut tomber en pétales de glace, le feu brûle dans l’âtre. Sa chaleur se répand, insistante et ravie. Le rêve marche nu sur ses pinceaux de soie. Les livres sont ouverts aux pages du bonheur. Pour accueillir nos corps, le monde étire plus fort ses muscles de bonté. Un chuchotement de terre soulève nos émois jusqu’à toucher le ciel. Un creux parmi tes mains me sert d’infini. Je caresse tes hanches comme un corps sanctifié. Le désir tremble autour et répand ses couleurs sur la toile de l’air. Je t’aime comme hier, aujourd’hui et demain. J’habite le miracle. J’habite la lumière. Nos fragiles parallèles ont fini par se joindre. Tu dors dans mes bras, éternelle et choisie.

Je regarde le ciel. Tu es dans chaque nuage, chaque avion qui passe, chaque hublot, chaque flocon. Tu es dans chaque train, chaque wagon, chaque auto. Tu es dans chaque miroir. Tu es dans chaque atome. C’est toi que je respire. Tu es dans chaque été, chaque hiver, chaque printemps, chaque automne. Tu es dans chaque jour sur le calendrier, chaque mot que j’écris, chaque page que je m’apprête à lire. Tu es dans chaque route, chaque vie, chaque mort. Tu es la ligne d’horizon, le soleil et la lune. Tu es dans chaque pas, chaque souffle, chaque geste. Tu es la vie entière.

Dans ta langue dansée, tous les mots sont des pas. Les phrases deviennent flûte, tambourin, violoncelle. Ta musique m’habite. Je m’appuie sur ton sol. Je caresse ton do. Tes noires et tes rondes me font danser de joie. Tes pétales font leurs gammes sur la tige d’un ré. Je regarde la mer. C’est en toi que je plonge, tout entier, de l’atome au cosmos. Tes mots à mon oreille sont un battement d’ailes, tes pas un battement du cœur. Ton ventre est un lever de soleil. Il enfante la vie.

Je bois ta sève entre l’arbre et l’écorce. Mes mains sont vides pour se remplir de toi. Mes yeux t’attendent. Mes bras se tendent vers ta peau. Tu demeures la flamme au milieu des flocons, un feu de neige dans la nuit, un pain de seigle dans ma faim. Tu es l’eau et la soif où j’invente ma bouche. Je tiens ta main comme en écho. Tu as fait de la cendre une poignée de lumière, de la pierre une source, de l’abîme une échelle. Tu as fait de ma vie beaucoup plus que ma vie.

C’est beau les arbres. C’est beau la neige. C’est beau la vie quand on la laisse fleurir. C’est beau quand on s’aime. Dans tes yeux, une petite flamme s’allume. Ça brille. Ça brille. Ça brûle tout le mauvais. Dans les miens aussi. Ça clignote de bonheur. Avec toi, je commence à être. À chaque jour, je renais. Je fais partie de quelque chose de vaste. J’ai les yeux plus grands que l’eau, les bras plus longs que l’air, pour te rejoindre, mon amour. J’ai le cœur plein de toi, la tête pleine de rêves, la bouche pleine de mots, pour te dire je t’aime. Fondamentalement athée, je crois en Dieu quand je te vois. Je crois en tout. Je crois en toi. À la vie. À la mort. À l’espoir. Au bonheur.

 

Publié dans Prose

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