Véronique Tadjo
Bibliographie :
Latérite. Paris, Hatier, 1984, poésie
A vol d'oiseau. Paris, Nathan, 1986, roman
Le Royaume aveugle. Paris, L'Harmattan, 1991
Champs de bataille et d'amour. Paris/Abidjan, Présence Africaine/NEI, roman
A mi-chemin. Paris, l'Harmattan, 2000, poésie
L'Ombre d'Imana. Voyages jusqu'au bout du Rwanda. Arles, Actes Sud, 2000
Talking Drums. London, A & C Black, 2000. A selection of poems from Africa edited and illustrated by Tadjo.
Reine Pokou. Arles, Actes Sud, 2005
Livres pour les enfants
La Chanson de la vie. Paris, CEDA, 1989
Le Seigneur de la Danse. Abidjan, Nouvelles Éditions Ivoiriennes, 1993
Mamy Wata et le Monstre. Abidjan, Nouvelles Éditions Ivoiriennes, 1993
Grand-mère Nanan. Abidjan, Nouvelles Éditions Ivoiriennes, 1996
Si j'étais roi... Si j'étais reine... Abidjan, Nouvelles Éditions Ivoiriennes
Masque, raconte-moi... Abidjan: Nouvelles Éditions Ivoiriennes
À mi-chemin
ON NE PART PAS SANS PERDRE DU
SANG. TU REVIENS, LE COEUR PLEIN DE
BONNES INTENTIONS ET PUIS, TES YEUX
PARCOURENT LA VILLE ET TU TOMBES DE
HAUT. IL FAUT REPARTIR À ZÉRO.
TU VEUX TOUCHER LES AUTRES, CEUX À
QUI TU PENSAIS, LÀ-BAS, DANS TON EXIL
SOUTERRAIN. MAIS LEUR PEAU EST
FLÉTRIE ET LEURS VISAGES SE
CREUSENT DE RIDES ASSOMBRIES. ET
LA SOLITUDE SE LIT DANS LE FOND DE
LEURS YEUX.
LE RETOUR, AH OUI, LE RETOUR ! POUR
APPRENDRE QUE LA MORT ÉTAIT LÀ
AVANT TOI ET QUE LES OISEAUX SONT
PARTIS AVEC LES DERNIÈRES PLUIES.
EN VÉRITÉ, LA SOLITUDE N'A PAS DE
NOM, PUISQU'ELLE SE CACHE DANS LES
RECOINS DE TON CORPS. ELLE SE
CACHE EN SUIVANT LE CHEMIN DE TES
VEINES. LA LIGNE DE TA COLONNE
VERTÉBRALE; ET LE MARÉCAGE DENSE
DE TON ESPRIT EN ÉVEIL.
INTERROGE LE MIROIR BRISÉ, LES
FRAGMENTS DE TON ÂME QUI TE DISENT
LA VÉRITÉ.
INTERROGE LA CASSURE, L'ÉPARPILLE-
MENT. INTERROGE, INTERROGE JUSQU'À
L'ÉPUISEMENT.
CAR, IL A FALLU QUE NOUS NAISSIONS
SEULS. CAR, IL A FALLU TROUVER LA
LUMIÈRE AU BOUT DU TUNNEL.
CAR, IL A FALLU QUITTER LA CHALEUR
MOITE POUR L'AIR SEC DU DEHORS.
*
Je vous salue
Vous les fouilleurs de poubelles
les infirmes
aux moignons crasseux
les borgnes
les hommes rampants
vous les maraudeurs
les gamins des taudis
je vous salue.
Quel fardeau portez-vous
en ce monde immonde
plus lourd que la ville
qui meurt de ses plaies?
Quelle puissance
vous lie à cette terre frigide
qui n'enfante des jumeaux
que pour les séparer?
Qui n'élève des buildings
que pour vous écraser
sous les tonnes de béton
et d'asphalte fumant?
Vous les mangeurs
de restes
les sans-logis
les sans-abri
Quel regard portez-vous
sur l'horizon en feu?
*
Comment veux-tu
parler
de l'arbre
et de ses fruits
quand les racines
se meurent
sous la terre malade ?
*
La racine des pierres
plonge très loin dans l'oubli
elle se gave des mémoires
que la terre rejette
Véronique Tadjo