Le cancer littéraire
- la véritable maladie du littéraire serait sans doute qu’il n’ait jamais fait ses deuils des Baudelaire, Verlaine, Rimbaud, Mallarmé, Hugo, Céline, Char, etc… . hors jamais une main ne pourra faire revivre ces esprits ni leur langue, et si leur manière frappa à la porte d’une époque ou d’une autre, celles-ci sont bel et bien passées. le poétique triture ses cadavres, fouille dans des organes pourris, d’où moultes pourritures écrites par le siècle présent, et soit dit en passant, bien trop jeune pour des jeux aussi macabres. si ces mains de maîtres anciens ont su transcender leur époque c’est qu’elles poussèrent au-delà d’un possible congru et étroit une forme et l’art d’une pensée. dans ce jeune siècle présent, quelle pensée mériterait une telle poussée et l’audace de l’élever pour que l’époque soit transcendée ? car il y a écriture et haute écriture. il y a écriture et l’exigence de l’écriture. et combien de taches noires d’ennui ? mais..restons curieux.
le plus souvent quand on pense et parle de poésie les pensées se tournent automatiquement vers le passé, et le passé prend toujours des proportions i m m e n s e s si bien que le présent s’en trouve décoloré déshabité et « du coup » il compte pour mort. au présent de ton présent, certaines mains avancent, peut-être à tâtons, dans ce que j’appelle « le moyen-âge du futur », elles défrichent et déblaient, s’arrachent et travaillent dur pour tasser concasser pousser des pierres de renom qui prennent toute la place, étouffant le moindre germe d’une parole neuve, parole que beaucoup sont incapables d’identifier. le passéisme est partout, dans tout, c’est une morbidité non pas latente mais effectivement, si réelle qu’on ne la voit plus. et « derrière » nous semble toujours plus beau et plus intéressant. pourtant, c’est ici maintenant que ça peut devenir intéressant, et dans toutes vos mains. et non, je ne pense pas prendre le chemin du facile, je pense plutôt rassembler des tresses de chemins pensés, rassembler des visions et tente d’en faire émerger une autre, et le but avoué est de permettre la perception d’un autre angle ou du moins de le questionner, non pas de chercher, mais de trouver « le courant d’air » qui fait ascension, pour voir plus loin — juste un peu…
Catrine Godin