Les mots sont volatils
On sait tous ce que c’est le mensonge. La vérité est plus difficile à cerner. La mort qui s’approche n’est peut-être qu’un amour qui naît, le même amour plus vaste, un amour infini. En attendant, je marche sans savoir d’une phrase à l’autre. J’accroche ma chair à l’ossature des mots. Je suis toujours dans l’étonnement d’écrire comme un oiseau dans la beauté du vol. Les mots sont volatils. Mes yeux durcissent comme des clous pour retenir les images. Si les mots s’additionnent, ils ne soustraient jamais. Ils posent sur le temps la chair qui manquait. Ce n’est pas seulement aux battements du cœur que je me sais vivant mais aux mots sur la page. Les jours où je n’écris pas, j’ai l’impression d’être absent. Sans métaphores, je ne vois plus le monde. Mes souvenirs culbutent par les trous de mémoire. Quand le soleil se lève, c’est une véritable joie. J’éponge la lumière par les pores de la peau mais je n’arrive jamais à en décrire la substance.
Il ne faut pas laisser se perdre un seul gramme de tendresse. Quelle merveille que la position debout, les deux piliers des jambes, le cou supportant la tête. C’est déjà le début de la parole, de l’accolade, de la caresse. Chaque matin, je regarde revenir la lumière, l’éblouissement du vivant au cœur des mots malgré les grondements des armes et le tintement des monnaies. Je mets mes pieds dans les souliers de la vie et je sors prendre l’air. On a toujours une raison de vivre, peu importe la raison. Chaque vie est la vie de chacun. Il y a toujours en nous une force inemployée, une réserve d’espoir, une lumière latente. Toute vie est une augmentation de l’amour. L’homme n’a pas inventé que la poudre à canon. Il nous arrive de croiser la bonté.