Ma mère (Bretagne)

Publié le par la freniere

 

Elle est assise
dans ses quarante kilos
devant la mer

 

vaste
comme les questions
qu’elle se pose

 

j’imagine
devant la mort.

 

Elle est assise
sous ses yeux
et sous le ciel

 

ses yeux regardent
et gardent ce qu’ils regardent

 

dans sa main
qu’elle dépliera de l’autre côté

 

comme un enfant montre ses billes
au soleil

 

et à ses copains.

 

Elle entraine ses yeux
à l’horizon

 

elle s’entraine
au point de non retour.

 

Assise
dans ses quarante kilos
dans ses quatre-vingt-deux ans

 

elle vérifie une dernière fois
le tour de la terre
par la mer

 

avec ses yeux
elle marche sur l’eau.

 

Elle cogne à l’horizon
pour ouvrir
à la mer

 

la porte du ciel.

 

Elle se prépare
pour être la première
le dernier jour.

 

Yvon Le Men


Publié dans Poésie du monde

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