Tu oublieras
Tu te scandaliseras
Du dernier massacre à la mode
Celui dont tous les médias
Font un sinistre tintamarre
Et puis tu oublieras
Tu te mobiliseras
Pour la douleur la plus proche
De tes affres gardées secrètes
Tu verseras ton obole,
Proportionnelle au nombre de décibels émises
Par tel cri de souffrance et de détresse
Et puis tu oublieras
Qu'importent ceux que tu ignores
Ceux dont l'agonie est indéfendable
Qui subissent une tyrannie
Si peu photogénique qu'elle en est dédaignée
Ou d'un si opulent profit
Que jamais ne leur sera jeté l'anathème
Cela aussi
Tes compromis et tes compromissions
Ton non-désir de regarder
Là où nul autre ne regarde
La lassitude et le doute en toi tus
Tu l'oublieras
J’ignore encore si l'oubli
Est monstrueux ou salutaire
Nécessaire condition de survie
Pour avancer délesté de mémoire
Ou veulerie indigne
Mais peut-être ne suis-je
Pas encore assez être humain pour le savoir