Florence Noel
il peut pleuvoir des clous, dru et acéré, pleuvoir toutes dents dehors, exiguëment, surpiquer chaque silhouette avec cette volonté obtuse de la machine sans âme, pleuvoir avec la conscience de l'orfèvre martelant l'argent pour la châsse, il peut pleuvoir, vannes tranchées, hémorragie aqueuse, comme un joug, comme un deuil, un sortilège ou un châtiment, pleuvoir sans haine et sans désir, les semelles molles de sentes renoncées, pleuvoir au hachoir, à la faux, requiem pour un sobre, pleuvoir comme des pilastres, étançonner le ciel, pleuvoir aller retour, au jeu de la marelle, de marres en nuées, il peut pleuvoir toute l'ombre vomie par les abysses, pleuvoir sans un péché, sans même une insulte, en monocorde disgrâce, sans mobile, sans délai, à en dissoudre les cris, les corps et les caresses, peut-être, même les caresses, même qui sait la douceur.... j'aimerai jusqu'à l'os que l'eau feule rongera et j'aimerai dans cet os tout le sec lové dans l'ADN du monde oublié sous la pluie.
Florence Noel