Avec de grands gestes

Publié le par la freniere

 

Avec de grands gestes,

J’ai jeté pendant quatre ans mon âme dans toutes les langues,

J’ai cherché, libre et fou, tous les endroits de vérité,

Surtout j’ai cherché les dialectes où l’homme n’était pas dompté.

Je me suis mis en quête de la vérité dans toutes les langues.

 

Le martyre de mon peuple on m’interdisait

            En français.

J’ai pris le croate, l’irlandais, le hongrois, l’arabe, le chinois

Pour me sentir un homme délivré.

 

J’aimais d’autant plus les langues étrangères

            Pour moi pures, tellement à l’écart :

Dans ma langue française (ma seconde langue) il y avait eu toutes les trahisons

            On savait y dire oui à l’infamie !

 

J’ai senti le martyre de mon peuple dans les mots de tous les pays :

J’ai souffert en breton, français, norvégien; tchèque, slovène, croate;

            Et surtout en russe :

Je me suis étendu sur la grande terre russe,

J’entendais les chants d’un peuple immense qui voulait bien mourir

 

Et là, crucifié, je ne sentais pas de mal,

 

Là, fatigué, je ne sentais que de la rosée,

Là, fatigué de moi, je me sentais reposé,

 

Là, fatigué, j’ai tout senti en rosée.

 

Armand Robin

 


 

Publié dans Prose

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