Chien paria

Publié le par la freniere

Tandis que je joue,
la ville lentement se reconstruit,
pierre à pierre, toutes numérotées.

 

Chaque pierre
part à la recherche de ses semblables,
et ses sœurs se joignent à elle.

 

Les fissures du pavé
reprennent leur place,
et tout est pardonné.

 

Les arbres reviennent à eux-mêmes,
chacun d’eux
prêt à rendre compte de ses feuilles.

 

L’acajou lâche
un écrin débordant de semences ailées
sur le bord de la route,
comme un voleur amateur
lâche des bijoux volés
à la vue d’un flic.

 

L’église St Andrew’s rentre chez elle sur la pointe des pieds ;
ses chaussures à la main,
comme un mari qui a fait la noce toute la nuit.

 

L’université,
ça devrait te faire plaisir,
ne peut jamais aller au diable

 

malgré son Alzheimer,
car elle garde toujours son adresse
sur elle.

 

Mes narines frémissent.
Une odeur multicolore,
d’innocence et de lavande,

 

de sueur suave et âcre,
vernis à ongle,
bois de rose et résine,

 

remonte comme un feu de Bengale
dans mes narines
et explose dans mon cerveau.

 

Ce n’est pas tant la jeune fille  aux longues jambes
qui prend un raccourci
en traversant cet îlot, comme toujours,

 

son étui à violon à la main,
en retard une fois encore au cours de musique
à Max Mueller Bhavan,

 

qu’un avertissement me signifiant
que mon idylle
touche à sa fin,

 

que l’heure est venue pour moi
de rendre la ville
à ses soi-disant maîtres.

 

Arun Kolatkar

traduction : Laetitia  Zecchinni

 

Publié dans Poésie du monde

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article