Les chemins sont coulants

Publié le par la freniere

Les chemins sont coulants. Le vent s’enfarge et se relève. Les sapins farandolent. Entre la sloche et la gadoue, je préfère la neige. Il y a des fuites dans la toiture blanche, des trous dans le givre des portes. Je n’entends plus sonner la cloche des verdures, la clarine des fleurs. Le cri des bêtes reste pris dans la glace. Le silence est coupant sur le givre des mots. Je danse dans l’abîme pour amortir la chute. La neige efface tout, même la mémoire de l’air. Il fait trop froid pour sortir un crayon. Nul oasis dans le froid. Une maison de papier n’arrête pas le blizzard. Les pas s’égarent dans un désert de neige. Je perds mon ombre derrière moi. Je deviens l’ombre de la neige. Les pas ne comblent pas l’ignorance des routes. Seul le feu du visage éclaire le chemin. Il n’y a que le sang pour réchauffer le corps. Dans les bourgeons du gel, la sève donne l’alerte aux arbres. Le foin des yeux convoque les couleurs, le pain chaud des images, le pinceau des paroles. Il faut du vide pour faire le plein, deux rives pour un pont, deux cœurs pour aimer, du temps pour l’espérance. Je marche vers un loin qui recule sans cesse. Il n’y a pas d’exactitude dans les propos de la neige, pas de ligne directrice. La neige ne tient pas les promesses du ciel. La manne est sous la peau, au cœur des viscères, au centre des neurones, dans la palpitation du sang.

Publié dans Prose

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